Niger. Le putsch, expression d’une mal gouvernance africaine
La place de l’armée est incontestablement dans les casernes. On ne peut rien construire avec la violence. Le rôle principal de l’armée est de défendre l’intégrité territoriale d’un pays. Elle doit toujours être soumise au «politique», appelé à être/devenir l’expression légitime et démocratique de toute formation sociale.
Il y a quelques semaines, l’Afrique a assisté à un nouveau déchirement interne au Soudan. Un vaste pays qui dispose d’un extraordinaire potentiel, et où la violence est devenue quasi-permanente. Il y a quelques jours, ce fut le tour du Niger où des putschistes se sont emparés du pouvoir, en écartant un président élu démocratiquement, tout au moins sur le plan formel. Pour sauver cet acquis, un ultimatum a été lancé par la Cedeao pour que les militaires retournent à leurs casernes. L’option diplomatique semble avoir échoué, pour l’instant.
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L’option militaire est envisagée, notamment par des pays membres de la Cedeao. Mais le Burkina Faso et le Mali ont exprimé leur soutien aux putschistes. L’ultimatum est arrivé à terme, le 6 juillet, à minuit. Cependant, au Nigéria, principal acteur de la Cedeao, une majorité de sénateurs ont exprimé leur opposition à l’option militaire, privilégiant la voie diplomatique. Le Nigéria, première puissance démographique en Afrique, partage une frontière de plus de 1500 km avec le Niger. L’Algérie aussi, qui partage presque 1000 km avec le Niger, a exprimé des réserves quant à l’intervention militaire.
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C’est là une situation très dangereuse qui peut connaitre un embrasement à tout moment. L’ONU, comme instance internationale, est absente. Il en est de même de l’Union Africaine, organisation régionale/continentale. La Cedeao est surtout une organisation à vocation économique. Elle a d’ailleurs déjà ordonné un blocus économique du Niger. À travers cette crise, apparaissent les vrais problèmes d’un continent en mal de gouvernance. D’un côté, la menace terroriste, de l’autre, le retour des pratiques putschistes. Tous deux condamnables. Comme si l’Afrique n’avait pas d’autres alternatives. Les moments d’émotions et de colère ne sont propices ni à la raison, ni à la sagesse. Les foules sont facilement manipulées dans ce type de contexte.
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Difficile de voir émerger une prise de conscience collective, avec l’émergence d’un nouveau projet de société mobilisateur, où la démocratie s’invente localement et s’enracine pour entamer une transformation radicale et irréversible de toute la formation sociale. Aujourd’hui, ce processus est bloqué par la violence aussi bien d’origine interne qu’externe. L’un des premiers pays européens concernés par cette crise est la France qui exploite l’uranium à travers le groupe français Orano. Cette multinationale qui exploite trois mines nigériennes d’uranium, dans des conditions très critiquées par les ONG et les médias, au niveau international, est détenue à 90% par l’État français. En 2022, 17 615 tonnes d’uranium naturel ont été importées du Niger, moins que la quantité importée du Kazakhstan (23 822 tonnes).
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Au cours des dix dernières années, sur les 88 200 tonnes d’uranium naturel importées par la France, les trois principaux pays dont dépend la France pour ses importations sont : le Kazakhstan (27%), le Niger (20%) et l’Ouzbékistan (19%). Le Niger dispose aussi de mines de charbon exploitées à ciel ouvert. Avec une superficie de 1 267 000 km², il dispose aussi de plusieurs réserves de pétrole, avec l’ambition d’exporter 200 000 barils par jour, à partir de 2025. Le groupe canadien SEMAFO y exploite des mines d’or. Malgré ce potentiel, à peine le tiers de la population est alphabétisé, avec un classement au 189ème rang sur 191, en matière de développement humain. C’est dire que le peuple du Niger, à l’instar de la plupart des peuples d’Afrique, est confronté à plusieurs défis, qui ne pourraient être relevés ni par l’armée, ni par des puissances étrangères intéressées non pas par le développement du Niger, mais par leurs propres intérêts.