Edito. La vraie force d’un Etat social
Un environnement favorable à l’émergence des compétences nationales est le fruit d’une convergence des efforts de tous les secteurs. Une population bien éduquée et en bonne santé est le premier capital d’une nation. Une école de qualité accessible à toutes et à tous, c’est aussi des qualifications, des capacités individuelles et collectives, plus de civisme, de participation active à la gestion de la vie publique, aux niveaux national et local. C’est aussi moins de dépenses en matière de sécurité. Un système da santé de qualité, accessible à toutes et à tous, c’est une population en bonne santé et donc moins de maladies, moins d’arrêts de travail, moins de dépenses en médicaments, en infrastructures sanitaires (…). Ces deux facteurs que sont l’éducation et la santé constituent la première force de l’Etat social, aux niveaux macroéconomique et microéconomique. Ainsi, une entreprise privilégiant la formation professionnelle continue de ses ressources humaines ne peut que se renforcer qualitativement dans un contexte de concurrence.
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Investir dans le développement des capacités des travailleurs, améliorer les conditions de travail et le pouvoir d’achat des salariés, développer un dialogue et un partenariat social effectif (…) sont autant d’actions pouvant hisser les entreprises et l’ensemble de l’économie vers le haut. Aujourd’hui, c’est cette convergence entre l’Etat social et l’élite économique qui semble faire défaut. L’Etat social, à travers les chantiers stratégiques de la généralisation de la protection sociale et de la réforme des systèmes de santé et d’éducation, s’est fixé comme objectif prioritaire de tirer la nation vers le haut. Le grand patronat, enfermé dans la logique spéculative, semble nager à contre courant, en tirant vers le bas. A Casablanca, capitale économique, comment pourrait vivre un salarié avec un SMIG mensuel inférieur à 3 000 dirhams ? La location d’un logement économique situé dans la périphérie urbaine absorbe plus de 50% de ce montant. Avec en plus les charges inhérentes au logement et au transport quotidien, que reste-t-il au travailleur pour survivre, au moment où les produits alimentaires sont les premiers à être touchés par l’inflation ? Ne parlons pas de l’achat d’un journal, d’un livre (…). Le soir, arrivé exténué chez lui, il se contentera de quelques informations diffusées par la télévision ou les réseaux sociaux. Il doit se réveiller à 5 heures du matin pour ne pas être en retard au boulot, et rentrer chez lui, généralement au-delà de 21 heures. Ces conditions de travail et de vie sont-elles favorables au développement des capacités professionnelles nécessaires à la productivité et à la rentabilité d’une entreprise ? Ne parlons pas de l’épanouissement de la personne….
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L’Etat social aura beau publier des lois, des décrets et des arrêtés. Cela ne changera guère la réalité si l’acteur principal qu’est le secteur privé dans une économie de marché ne prend pas le relai. Cette contradiction où les travailleurs sont pris en étau ne peut mener que vers l’impasse. Le dialogue social formellement réactivé le 30 avril 2022 n’a pas changé cette réalité. La convergence des acteurs publics, privés et sociaux, est incontournable pour entamer une dynamique sociétale. Plus que jamais, le Maroc d’aujourd’hui a besoin d’une élite économique à la hauteur des défis du 21ème siècle. Une élite pour laquelle concurrence et transparence sont inséparables.