Assemblées FMI-BM. L’accroissement de la dette menace la réduction de la pauvreté et les objectifs du « Net Zero »
Le président de la Banque mondiale, Ajay Banga, a lancé un avertissement sévère : le lourd fardeau de la dette qui pèse sur les pays appauvris compromet deux objectifs mondiaux essentiels, à savoir la réduction de la pauvreté et la réalisation des objectifs d’émissions nettes de gaz à effet de serre.
S’adressant à l’assemblée annuelle de la Banque mondiale à Marrakech, le nouveau directeur de l’institution a appelé à une action accélérée en matière d’allègement de la dette. Néanmoins, il a également reconnu qu’il n’y avait pas de « baguette magique » pour résoudre miraculeusement ce problème pressant. Indermit Gill, économiste en chef de la Banque mondiale, a rappelé le contexte historique, soulignant que la dernière fois que la Réserve fédérale avait augmenté les taux d’intérêt de manière agressive, il y a plus de quarante ans, cela avait entraîné la faillite de 24 pays. La gravité de cette déclaration souligne l’ampleur de la crise actuelle.
Ce scénario inquiétant se déroule dans un contexte d’intérêt croissant pour une coopération mondiale potentielle afin de faire face à l’escalade de la crise de la dette. Dans cette optique, Janet Yellen, secrétaire au Trésor américain, a annoncé son intention de rencontrer Pan Gongsheng, le directeur de la banque centrale chinoise. Les discussions porteront sur un large éventail de sujets, dont la perspective d’une collaboration renforcée sur les questions liées à la dette.
Alors que les relations diplomatiques entre Washington et Pékin sont tendues, les pressions croissantes exercées sur les pays endettés par la hausse des taux d’intérêt mondiaux ont incité Mme Yellen à souligner la nécessité d’une aide accrue. La Chine s’est imposée comme une nation créancière de premier plan à l’échelle mondiale, et son soutien est considéré comme essentiel pour les pays qui cherchent à obtenir un allègement par le biais du cadre commun, un mécanisme d’allègement de la dette mis en place par le G20, qui comprend les principaux pays développés et en développement. L’initiative a été lancée en 2020, mais elle a été critiquée pour sa lenteur apparente et son aide concrète limitée.
Mme Yellen a déclaré : « Bien que les progrès aient été lents et qu’il faille certainement les améliorer […], nous avons constaté des avancées significatives. J’espère que d’autres progrès pourront être réalisés ».
Un rapport récent de Debt Service Watch, une coalition d’associations de lutte contre la dette, dresse un tableau sombre de la crise de la dette qui frappe les pays en développement. Le rapport suggère que les perspectives actuelles sont plus sombres que lors de la crise de la dette latino-américaine des années 1980 et des deux séries de programmes multilatéraux d’allègement de la dette à la fin des années 1990 et au milieu des années 2000.
Selon le rapport, le service de la dette absorbe aujourd’hui 54 % des recettes budgétaires et 40 % des dépenses publiques en Afrique. Ce scénario désastreux ne se limite pas à une seule région ; dans le monde entier, 35 pays consacrent plus de la moitié de leurs recettes au service de la dette, et 54 pays y consacrent plus d’un tiers.
Ces chiffres représentent plus du double des niveaux enregistrés par les pays à faible revenu avant l’initiative en faveur des pays pauvres très endettés des années 1990 et l’initiative d’allègement de la dette multilatérale de 2005. En fait, ils dépassent légèrement le poids du service de la dette auquel les pays d’Amérique latine étaient confrontés dans les années 1980.
Le rapport Debt Service Watch distingue cinq pays qui sont aux prises avec les coûts du service de la dette les plus élevés en pourcentage de leurs revenus. L’Égypte affiche un taux stupéfiant de 196 %, suivie de la Sierra Leone (169 %), de la Gambie (165 %), de São Tomé et Príncipe (137 %) et du Malawi (133 %).
Pour faire face à cette crise croissante, quatre pays – le Tchad, la Zambie, l’Éthiopie et le Ghana – ont déjà demandé un allègement de leur dette au titre du cadre commun. Ces actions soulignent la gravité de la situation et l’impératif d’une collaboration internationale pour atténuer les maux de la dette qui menacent le développement mondial et les efforts de réduction de la pauvreté.