Agriculture

Stress Hydrique : faut-il stopper les cultures dépensières en eau ?

L’avocat et la pastèque sont des cultures prises pour cibles dans cette conjoncture hydrique. Aujourd’hui, plusieurs voix s’élèvent appelant à l’abandon de ces cultures. Cependant, qu’en serait-il des conséquences sur les devises? Analyse.

Dans une récente publication, le Centre scientifique européen de l’Union européenne (UE) a publié un rapport alarmant sur les six années consécutives de sécheresses graves et prolongées qui frappent l’Afrique du Nord. « Ce phénomène, qui a également touché certaines parties de l’Europe au cours des deux dernières années, a entraîné de graves pénuries d’eau et entravé la croissance de la végétation au Maroc, en Algérie, en Tunisie, à Malte, dans le sud de l’Espagne et dans le sud de l’Italie. »

Intitulé « Sécheresse en Méditerranée », ce rapport du Centre commun de recherche (JRC) de la Commission européenne attribue la sécheresse actuelle à « des températures prolongées et supérieures à la moyenne, des vagues de chaleur et de faibles précipitations ».

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Aujourd’hui, dans ce contexte de conjoncture climatique, l’un des secteurs les plus touchés est bien évidemment celui de l’agriculture, qui depuis quelques années est touché directement dans le cœur de son activité. L’eau étant le moteur de ce secteur, sa rareté dans le monde rural où repose le creuset de l’agriculture marocaine, devient de plus en plus problématique et inquiétante.

Et depuis un certain temps, certaines voix appelant à des décisions radicales ont commencé à émerger. Pour ces derniers, pour contrer le déficit en eau, et encore mieux gérer de façon efficiente l’or bleu, il faut impérativement mettre fin à certaines cultures dépensières, notamment celle de l’avocat, de la tomate ou encore celle de la pastèque.

Importantes sources de devises

L’agro économiste Larbi Zagdouni se veut sans détour. « Le Maroc étant dans un état de stress hydrique critique ne peut s’adonner à la culture de l’avocat. L’eau étant un bien public, surtout en de pareille rareté de l’offre hydrique, la culture de l’avocat est un luxe qu’on ne peut se permettre », explique l’expert. Et d’ajouter : « On est dans un cas d’enjeu de sécurité hydrique. Et on entend bien tous les discours autour des externalités économiques de cette culture, cependant je pense que la question de la durabilité doit l’emporter sur les questions de chiffre qui pour moi sont court-termistes. Il faut donc sortir de cette logique du « après moi le déluge » car avec les températures que nous frôlons, la question climatiques doit être prise au sérieux pour ne pas qu’un jour on arrive à manquer d’eau à boire ».

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En face de ce discours, d’autres voix, bien que conscientes de l’effet de la crise hydrique, voient par contre les choses autrement. C’est le cas du président de la Comader, Rachid Benali, qui nuance en admettant les potentiels économiques de ces cultures. « La culture de l’avocat par exemple, au-delà des emplois, offre au Maroc d’importantes devises », martèle-t-il. « Aujourd’hui, des réflexions sont en cours sur le fait d’utiliser l’eau dessalée pour compenser l’utilisation de ressources douces », explique le président de la Comader. De son côté Mostafa Chehhar, directeur du Domaine vert au Groupe Crédit Agricole déclare : « face au discours idéaliste qui prône l’arrêt de certaines cultures, je pense qu’on ne doit pas céder au conjoncturel. Ces cultures à l’export apportent de la devise, et pas que, elles permettent à l’agriculture marocaine d’être compétitive dans le domaine de l’agriculture. Et d’ajouter : « Aujourd’hui, en plus des solutions de ressource d’eau alternative, on peut par exemple développer davantage les techniques comme l’agriculture non irrigable ou l’irrigation point par point ».

Agriculture non irriguée, une approche écosystémique

Dans une étude de l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, le procédé de l’agriculture non irriguée se positionne aujourd’hui comme une alternative idoine pour la préservation des ressources en eau. Selon le FAO, cette technique consiste à contrôler la quantité d’eau disponible pour une culture en déviant de façon opportuniste les écoulements d’eau de pluie afin d’accroître l’humidité du sol dans la zone des racines des plantes. Il n’empêche que le calendrier d’arrosage reste dicté par les précipitations et non pas par les agriculteurs. Pour rappel, l’irrigation génère la moitié du produit intérieur brut agricole et 75 % des exportations du secteur. Afin de promouvoir un modèle d’irrigation plus durable, le gouvernement marocain avait mis en œuvre un plan national pour optimiser l’utilisation des ressources hydriques et accroître la productivité de l’agriculture, notamment le Plan national d’économie d’eau d’irrigation (PNEEI), soutenu par la Banque mondiale depuis 2010.

 
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