Diplomatie

Comment le Maroc étend son influence dans le nouveau Sahel

Le 6 novembre 2023, le souverain marocain a annoncé son intention de tourner le Maroc vers l’Atlantique et, ce faisant, d’associer les pays du Sahel à cette initiative en leur proposant un accès à la mer. Récemment, le ministre des Affaires étrangères a reçu en audience son homologue du Burkina Faso pour aborder cette question.

Le 16 septembre 2023, le Mali, le Niger et le Burkina Faso ont signé la charte du Liptako-Gourma, donnant naissance à l’Alliance des États du Sahel (AES), une structure censée fonctionner comme une alliance stratégique et de coopération entre ses membres. Cette région est sujette à des tensions géopolitiques. Isolé sur la scène internationale, le Maroc a tendu la main aux acteurs de l’AES en les incluant dans son projet panafricain de l’Atlantique. L’initiative découle d’un vœu royal. Dans son discours prononcé le 6 novembre à l’occasion du 48e anniversaire de la Marche verte, le roi Mohammed VI a proposé le lancement d’une initiative internationale favorisant l’accès des États du Sahel à l’océan Atlantique.

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« Pour qu’une telle proposition aboutisse, il est primordial de mettre à niveau les infrastructures des États du Sahel et de les connecter aux réseaux de transport et de communication implantés dans leur environnement régional », expliquait le souverain dans son discours. À Marrakech, le 23 décembre dernier, la diplomatie marocaine avait convié les ministres des Affaires étrangères de ces quatre États (Mali, Burkina, Niger, Tchad), sanctionnant cette première entrevue par l’adoption d’une feuille de route.

L’Afrique doit faire confiance à l’Afrique

« Le vouloir construire ensemble est le seul gage pour un espace atlantique africain fiable et durable. C’est pourquoi l’initiative marocaine pour la promotion de l’espace Afrique atlantique gagnerait à s’inscrire dans une dynamique d’appropriation collective dans l’ensemble des pays de la région. Cela devrait être l’affaire des États, mais aussi, et surtout, de la société civile et des peuples de la région », expliquait le professeur Jamal Machrouh, du Policy Center for the New South, dans une note produite sur le sujet. « L’initiative royale de facilitation de l’accès à l’Atlantique au profit des pays du Sahel, lancée en novembre 2023, a été très rapidement suivie d’une réunion tenue à Marrakech, le 23 décembre, à laquelle ont participé les ministres des Affaires étrangères du Maroc et des quatre pays sahéliens, pour discuter des questions de mise en œuvre. À l’issue de cette réunion, les cinq ministres sont convenus de la création, dans chacun des pays, d’une task force chargée de conduire des réflexions et de présenter des propositions sur les modalités de concrétisation de l’initiative », éclaire l’expert.

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Il faut d’ailleurs rappeler que l’initiative porte un schéma de désenclavement des pays du Sahel en leur facilitant l’accès à l’océan Atlantique. Selon les Nations Unies, les pays enclavés voient leur produit intérieur brut amputé de 20 % du simple fait de leur non-accès à la mer. Les relations entre le Sahel et le Maroc ont existé de tout temps. Les Maures, les Touaregs… Toutes ces tribus attestent des échanges économiques au travers du commerce caravanier.

Une zone économique régionale ?

À l’heure où le monde et les espaces géoéconomiques se recomposent davantage, l’Afrique a plus que jamais besoin d’aller vers une politique économique des grands ensembles. « Contre vents et marées, les pays de l’Afrique atlantique tentent de construire leur autonomie stratégique. Dans cette quête, la mer pourrait constituer la figure de proue, et ce, pour deux raisons : d’abord, la maîtrise de la mer permettra aux pays de la région d’asseoir leur souveraineté sur une bonne partie de leur territoire jadis ignorée, les espaces maritimes ; ensuite, l’exploitation intelligente des ressources marines pourrait constituer un inestimable vecteur de croissance et de développement », souligne une étude du Policy Center.

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« Je pense que cette initiative constitue un excellent prélude à une intégration intra-africaine accrue, puisqu’elle peut être perçue comme un catalyseur d’émergence économique et d’inclusion de davantage de pays, notamment les pays du Sahel n’ayant pas l’opportunité d’une façade atlantique », confie Hicham Bensaid Alaoui, économiste et CEO d’Alliance Trade Maroc. De son côté, l’économiste Driss Aissaoui déclare : « Le projet de l’initiative atlantique, c’est l’avenir. C’est plus d’une vingtaine de pays africains qui vont utiliser leur savoir et leur savoir-faire pour transmettre de la valeur et devenir des vecteurs de richesse et de développement. »

 
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