histoire

Jawaharlal Nehru : un symbole toujours vivant

1964-2024 : 60 ans après le décès de ce grand symbole du non alignement, sa pensée demeure d’actualité, dans un contexte mondial à nouveau menacé par de nouvelles barbaries qui s’annoncent, cette fois-ci, beaucoup plus destructives et plus meurtrières.

J. Nehru est l’un des grands symboles de la lutte contre le colonialisme et pour le non alignement. Compagnon de Mahatma Gandhi, depuis 1916, il contribuera à l’indépendance de son pays. Il sera aussi le « premier premier ministre de l’Inde indépendante », en 1947. J. Nehru représente aussi toute une génération qui sera à l’origine du mouvement des non alignés, officiellement créé en 1955, lors de la Conférence de Bandung. Dans le contexte international de l’après seconde guerre mondiale et de la guerre dite froide, J. Nehru, comme Jamal Abdenacer, en Egypte, Tito en Yougoslavie, ou Mehdi Ben Barka au Maroc (…), avait bien compris que les formations sociales constituées en Etats indépendants et souverains, regroupées dans le concept de « Tiers Monde », n’avaient pas intérêt à suivre aveuglément l’un des camps opposés qu’étaient le « bloc ouest » et le « bloc est », ou le « monde libre » et le « monde communiste » .

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En effet, pour J. Nehru, « le seul camp dans lequel nous aimerions être est celui de la paix et de la bonne volonté ». En fait, il s’agit d’un « neutralisme positif et actif » où le non alignement est une bonne voie (une troisième voie) qui prône la paix pour toutes les nouvelles nations indépendantes, appelées à coopérer et à se solidariser. Chaque formation sociale est censée suivre son propre chemin en matière de développement, tout en s’inspirant librement des diverses expériences internationales, sans transposition, sans « copier-coller », comme diraient aujourd’hui les nouvelles générations moulées dans le nouveau langage numérique. J. Nehru comprendra bien que la vraie lutte commence après l’accès à l’indépendance. Les anciennes puissances coloniales n’ont pas tout lâché. Elles ont plutôt su innover pour maintenir leur domination, certes de manière moins directe et moins visible.

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A elle seule, l’Inde, berceau historique de la sagesse, forme presque un continent, avec une diversité ethnique exceptionnelle. Plus moderniste que M. Gandhi, grand symbole de la non violence, J. Nehru a opté pour des réformes profondes en vue de favoriser l’intégration de l’Inde dans le « concert des nations ». Mais pas à n’importe quel prix. Et là apparait la profonde influence de la sagesse du M. Gandhi. « Respecter d’abord les moyens avant de considérer la fin ». Il s’agit d’un anti-machiavélisme qui défend une vision politique où les valeurs morales sont centrales. Fin et moyens doivent être cohérents. Le développement industriel sera pour J. Nehru une option prioritaire et stratégique, tout en se basant sur des méthodes de planification, dans une optique socialiste. C’est l’époque où, en l’absence d’une bourgeoisie nationale capable d’investir et de jouer un rôle fondamental dans la croissance et le développement, c’est à l’Etat qu’a été confié le rôle moteur du changement économique et social. J. Nehru tenta aussi d’éviter le conflit attisé par le colonialisme britannique conte le Pakistan. Vainement. Tout en assurant la stabilité politique de l’Inde, en tant que premier ministre, ses efforts de lutte contre la misère et le sous développement rencontreront des difficultés et obstacles inhérents au sabotage néocolonial et à la corruption à laquelle il devra faire face au sein même du parti du Congrès qu’il dirigeait. En 1962, le conflit armé avec la Chine va affaiblir l’Inde et contraindre J. Nehru à accepter l’aide des Etats Unis d’Amérique, renonçant ainsi au non alignement. Immédiatement après, la santé de Nehru va se dégrader. Après une brève convalescence au Cachemire, il succomba à une crise cardiaque, en 1964.

Aujourd’hui, la pensée de J. Nehru, comme celle de nombreux symboles de la lutte anticoloniale et du non alignement actif, mérite d’être mieux connue par les nouvelles générations. Face à la guerre entre la Russie et l’Ukraine, et tout en défendant le respect du droit international, surtout par les « grandes puissances » qui continuent, de fait, à n’admettre que les rapports de force, de nombreux Etats, en Afrique, en Asie et en Amérique Latine, ont refusé de s’aligner bêtement et aveuglément sur l’un des camps adverses. En fait, ce conflit, comme d’autres, notamment en Palestine où un processus génocidaire est engagé et encouragé par l’impunité, n’est qu’une fissure annonciatrice de nouveaux bouleversements mondiaux où le « Sud global » est appelé à jouer son propre rôle, dans l’émergence nécessaire d’une nouvelle gouvernance mondiale, fondée avant tout sur le respect du droit international et sur la protection de la dignité des êtres humains et de peuples.

 
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