Comment le Maroc est devenu le premier investisseur africain en France
Les relations économiques entre le Maroc et la France se caractérisent par une dynamique sans cesse renouvelée, reflétée notamment par l’importance croissante des investissements marocains en France.
Alors que les échanges commerciaux bilatéraux restent solides, le Maroc s’affirme comme un acteur clé dans le paysage des investissements étrangers en France. En 2022, le Royaume s’est hissé au premier rang des investisseurs africains dans l’Hexagone, un statut qui va bien au-delà de simples transferts financiers, contribuant de manière significative à la création d’emplois et à l’innovation industrielle.
Un flux d’investissements en pleine expansion
Depuis l’ouverture du compte capital par l’Office des changes en 2007, les entreprises marocaines ont progressivement intensifié leurs investissements à l’étranger, un mouvement qui s’est accéléré au cours des dernières années. Selon les données de l’Office des changes, les Investissements Directs Marocains à l’Étranger (IDME) ont atteint un montant record de 25,6 milliards de dirhams en 2023, après un rebond marqué par la reprise post-pandémie. Parmi ces flux, la France occupe une place prépondérante, accaparant près 60% des IDME en 2022.
Lire aussi | Relations économiques Maroc-France: les patrons français veulent croire à une « lune de miel »
Cette orientation témoigne non seulement de la solidité des relations bilatérales, mais aussi de l’attractivité de la France pour les investisseurs marocains. En se positionnant comme premier investisseur africain en France, le Maroc dépasse des partenaires majeurs tels que les Émirats arabes unis et l’Afrique du Sud. La France bénéficie ainsi d’un apport important en capitaux qui, contrairement à d’autres formes d’investissement, est directement lié à la création d’emplois et à l’implantation de projets industriels stratégiques.
La création d’emplois, un levier majeur
Au-delà des chiffres d’investissement, l’impact des IDE marocains en France se mesure particulièrement par leur contribution à l’emploi. En 2022, les entreprises marocaines se sont distinguées en tant que premier créateur d’emplois africain en France. Selon un rapport d’EY et les données de Business France, les nouvelles implantations marocaines ont généré une hausse impressionnante de plus de 160% des emplois créés ou sauvegardés par rapport à 2021.
Ces créations d’emplois ne se limitent pas aux secteurs traditionnels. Les entreprises marocaines s’engagent de plus en plus dans des industries innovantes, notamment à travers des partenariats avec des entreprises françaises. Par exemple, la PME marocaine Groupelec, spécialisée dans la conception de tableaux électriques intelligents, a choisi d’établir son bureau européen à Sisteron, en France, afin de profiter du label « Made in France » pour ses exportations vers les marchés africains. Ce projet, qui s’accompagne de la création de 14 emplois, illustre bien l’approche stratégique des entreprises marocaines qui, en s’implantant en France, combinent innovation technologique et synergies industrielles avec leurs partenaires français.
Une diversification sectorielle bénéfique
Les investissements marocains en France ne se concentrent pas uniquement sur l’industrie. Ils touchent également des secteurs clés comme le commerce, les activités financières et, dans une moindre mesure, l’immobilier. Toutefois, l’industrie reste le secteur de prédilection des entreprises marocaines, représentant plus de 70% des IDME en 2022, soit un montant de 13,66 milliards de dirhams. Ce chiffre reflète la montée en puissance des acteurs marocains dans des domaines tels que l’aéronautique, l’automobile, et plus récemment, l’énergie et les technologies vertes.
Lire aussi | L’euro sur le point d’égaler trois cent fois le dinar
Parallèlement, le secteur bancaire marocain continue de renforcer sa présence en France, attirant plus de 1,67 milliard de dirhams en investissements en 2022. Les grandes banques marocaines, à l’instar d’Attijariwafa bank, consolident leur position en France, jouant un rôle de passerelle pour les entreprises marocaines souhaitant s’implanter en Europe, tout en accompagnant le développement d’autres entreprises africaines dans la région.
Un levier stratégique pour la coopération bilatérale
Les investissements marocains en France, loin de se limiter à une simple participation financière, représentent un véritable levier de coopération bilatérale. Ils permettent aux deux pays de bénéficier mutuellement de leur expertise respective, tout en renforçant les liens économiques et humains. Avec près de 1300 filiales d’entreprises françaises implantées au Maroc, les investissements marocains en France viennent équilibrer cette relation, en démontrant la capacité du Royaume à jouer un rôle moteur dans les secteurs industriels européens.
Cette dynamique s’accompagne d’un soutien institutionnel accru, notamment via l’Agence française de développement (AFD) et BPI France, qui continuent de jouer un rôle clé dans le financement des projets marocains en France. De plus, la nouvelle Charte de l’Investissement au Maroc, couplée au dispositif de soutien aux IDE marocains à l’étranger, vise à stimuler encore davantage cette tendance dans les années à venir. Le Maroc est ainsi en voie de renforcer sa présence en France, tout en poursuivant ses objectifs de diversification économique et d’industrialisation accrue.
Vers une dynamique durable
Alors que les investissements marocains en France continuent de croître, cette tendance reflète un changement structurel dans la relation bilatérale. Le Maroc, désormais pleinement intégré dans les chaînes de valeur mondiales, ne se contente plus d’exporter des produits, mais investit activement dans des secteurs stratégiques, créant des emplois et contribuant à l’innovation. Cette dynamique ouvre la voie à de nouvelles formes de partenariat entre les deux pays, renforçant non seulement les liens économiques, mais aussi l’intégration des talents et des technologies entre les deux rives de la Méditerranée.