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Sarah KERROUMI: L’apport des femmes dans la gouvernance des entreprises permet d’équilibrer les styles de gestion et d’apporter une autre lecture des enjeux stratégiques»

À l’occasion du 8 mars, Challenge donne la parole à dix femmes d’exception qui façonnent l’économie marocaine. À la tête d’entreprises, de départements stratégiques ou de projets innovants, elles incarnent leadership, résilience et vision. À travers leurs parcours inspirants, ces managers prouvent que la réussite n’a ni genre ni limite. Découvrez leurs histoires, leurs défis et leur impact dans un paysage économique en pleine mutation.

Le leadership féminin en entreprise ne se résume pas à une question de représentativité ou d’équité, il s’agit d’un véritable levier de performance. Les études le démontrent : la diversité dans les instances de décision améliore la prise de décision et favorise l’innovation. Mais au-delà des chiffres, c’est avant tout une question de vision et de pragmatisme. Les entreprises qui s’ouvrent à des profils diversifiés, en intégrant davantage de femmes aux postes de direction, sont plus résilientes et mieux préparées aux défis contemporains. 

Dans mon parcours, j’ai pu constater que le leadership féminin repose sur des qualités distinctives, notamment une approche plus inclusive du management et une forte capacité d’adaptation. Il ne s’agit pas de dire qu’il existe un leadership exclusivement féminin ou masculin, mais plutôt de souligner que l’apport des femmes dans la gouvernance des entreprises permet d’équilibrer les styles de gestion et d’apporter une autre lecture des enjeux stratégiques.

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Chez Ynna, un groupe qui compte aujourd’hui près de 20 000 collaborateurs dont plus de 40% de femmes, l’un des plus hauts taux de représentation féminine au Maroc et même en Afrique, nous avons pleinement intégré cette réalité. Nous reconnaissons la femme comme un élément fondamental de la culture du groupe. Cette démarche se concrétise par la féminisation des postes à responsabilité, notamment dans la direction générale de plusieurs filiales clés. C’est une conviction forte qui nous guide et qui contribue à renforcer la dynamique de croissance du groupe en s’appuyant sur des talents diversifiés et complémentaires.

Dialogue et valorisation des compétences

Mon style de management repose sur la collaboration et l’écoute. J’accorde une importance particulière au dialogue et à la valorisation des compétences, car je suis convaincue qu’une équipe engagée et responsabilisée est plus performante. Cette approche peut différer de certains styles de management plus traditionnels, qui privilégient parfois des modèles plus verticaux et autoritaires.

Mon expérience, et celle de nombreuses femmes dirigeantes, a démontré que les femmes ont souvent développé une aptitude à jongler avec plusieurs responsabilités, à faire preuve d’agilité et à naviguer dans des environnements complexes. Cette flexibilité, associée à une forte capacité à fédérer, est un atout considérable dans le monde de l’entreprise, surtout dans un contexte économique où l’incertitude est devenue une constante.

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Cependant, il est essentiel de ne pas tomber dans le piège des généralisations. Chaque dirigeant, femme ou homme, a son propre style et ses propres convictions. L’essentiel est de trouver un équilibre qui permet à l’entreprise de grandir tout en plaçant l’humain au centre des préoccupations. C’est cette conviction qui guide mes actions chez Ynna, où nous nous efforçons de créer un environnement de travail inclusif et valorisant pour tous nos collaborateurs.

Des stéréotypes profondément ancrés

Malgré les progrès réalisés au cours des dernières décennies, les femmes marocaines qui aspirent à des postes de haute responsabilité doivent encore surmonter plusieurs obstacles. Il est important de reconnaître que ces défis ne sont pas toujours visibles, mais ils existent bel et bien.

Tout d’abord, il y a la question des stéréotypes profondément ancrés, qui laissent parfois entendre que certaines fonctions sont plus adaptées aux hommes. Ces idées reçues limitent les opportunités et freinent l’évolution de nombreuses femmes compétentes. Il est donc impératif de mettre en place des politiques de soutien adaptées, comme la flexibilité du travail et la promotion d’une culture d’entreprise inclusive.

Un autre défi majeur est la conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle. Les femmes portent encore souvent la plus grande part des responsabilités familiales, ce qui peut limiter leur disponibilité et leur mobilité professionnelle, rendant plus difficile leur ascension vers des rôles exécutifs.

 
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