Affaire Me Kamal Nasrollah vs CCC-Sun Beach : Espérons que les clubs privés en prennent de la graine
Dans une affaire récente opposant Me Kamal Nasrollah à l’association CCC-Sun Beach, une décision de justice met en lumière les écarts et abus qui peuvent exister au sein des clubs et associations. Mais aussi, cette affaire révèle l’importance cruciale du respect de la loi et des autorités pour garantir la transparence et la protection des droits des membres.
« Au nom de Sa Majesté le Roi et conformément à la loi, dans le dossier opposant Me Kamal Nasrollah à l’association CCC-Sun Beach, nous prononçons les décisions suivantes : l’annulation de la décision de la Commission d’Éthique et de Discipline (CED) du Club des Clubs de Casablanca concernant l’exclusion de Me Kamal Nasrollah. L’ordonnance de réintégration immédiate de Me Kamal Nasrollah au sein de l’association. L’application sans délai de notre décision». Telle est la décision judiciaire rendue par le tribunal de 1er instance de Casablanca dans l’affaire opposant Me Kamal Nasrollah au CCC-Sun Beach, un club prestigieux de Casablanca comptant 3300 membres, représentant l’élite de la bourgeoisie.
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En prononçant l’annulation de son exclusion, le 4 octobre 2023, le tribunal donne raison à Me Kamal Nasrollah en ordonnant sa réintégration immédiate, mais en plus, il ordonne l’exécution sans délai de sa décision. Ce qui signifie que même en cas d’appel, il est autorisé à revenir au club. Une décision que le tribunal accorde très rarement, seulement dans des situations où la violation de la loi est tellement flagrante qu’il est inutile d’attendre l’appel. Il faut dire que cette affaire est non seulement un cas d’école des pratiques illégales et des abus de pouvoir qui peuvent exister au sein des associations et clubs privés ; mais est également riche d’enseignements. Cette affaire démontre qu’un seul membre, fort de son droit, peut tenir tête aux dirigeants d’une association qui s’estiment au-dessus de la loi et de la souveraineté marocaine. Cette décision judiciaire constitue un rappel important de l’obligation de se conformer aux lois et de respecter les droits des individus au sein des clubs et associations.
Pour la petite histoire…
L’affaire débute lorsque Me Kamal Nasrollah, membre du comité directeur du CCC-Sun Beach, découvre des anomalies graves dans la passation de marchés, notamment pour la reconstruction de vestiaires. Malgré ses demandes d’explications, celles-ci lui sont refusées et il fait l’objet d’attaques diffamatoires avant son exclusion pure et simple de l’association. Au lieu du montant de 12.885.000 dirhams déterminé par l’expertise judiciaire contradictoire, le club a été facturé à hauteur de 24.700.000 dirhams, sans compter les autres travaux. A titre d’exemple, un groupe électrogène de 80 KVA, d’une valeur de 168.000 dirhams TTC, a été facturé au club 437.000 dirhams. Déterminé à faire valoir ses droits, l’avocat porte l’affaire devant la justice.
Ainsi, le 15 mai 2023, le tribunal correctionnel d’Ain Sebaa rend une décision selon laquelle le président du club a insulté Me Kamal Nasrollah, lors de la réunion trimestrielle avec les membres, du 7 décembre 2022. En conséquence, l’ex-président Mehdi Koraïchi a été condamné pour insulte à une amende de 15.000 dirhams. À partir de là, les choses ont commencé à dégénérer. Les dirigeants du Club ont poursuivi des autorités locales (le Wali, le Gouverneur, le Président de la commune) parce qu’elles leur ont refusé des autorisations de travaux, notamment du restaurant. Entre temps, une commission polyvalente est venue enquêter et plusieurs problèmes et irrégularités ont été mis à nu au sein du club. Notamment l’occupation illégale du domaine public maritime, l’absence d’autorisations d’exploitation du restaurant, etc. L’ONSSA a effectué une inspection et a constaté que la viande achetée ne respectait pas les normes, que les serveurs n’avaient pas de radio pulmonaire, etc. Le restaurant a donc été fermé administrativement le 6 juillet 2023.
De graves irrégularités constatées
Les autorités ont refusé de délivrer un récépissé pour l’Assemblée générale (AG) du 3 avril 2023, lors de laquelle le nouveau comité directeur a décidé d’ajouter un article au règlement intérieur stipulant que toute personne poursuivant un membre actuel ou ancien du comité de direction, ou engageant une action administrative quelconque, serait exclue du club jusqu’à ce que la justice rende une décision définitive. Même si la personne obtient gain de cause, il a été décidé que la commission de discipline du club devrait réexaminer la décision de justice afin de déterminer la suite à donner. Autant de décisions prises en violation des droits constitutionnels du citoyen marocain en matière de justice, notamment son droit d’ester en justice, tel que prévu à l’article 118 de la Constitution du Royaume.
Où en est-on aujourd’hui ?
A date, le président du Club a été contraint à la démission le 3 septembre 2023. Une Assemblée générale ordinaire, convoquée de manière extraordinaire, est prévue pour le 20 octobre 2023. Espérons qu’elle aboutira à l’élection de nouveaux dirigeants afin de restaurer l’esprit Club et de rétablir le respect envers les autorités locales et la ville. En réalité, les autorités ont fait un travail remarquable dans cette affaire en appliquant simplement la loi. Certaines personnes ne l’ont pas accepté car elles estimaient être au-dessus de la réglementation.
Les leçons à tirer
Cette affaire devrait renforcer la confiance des membres dans le travail des autorités, qui ont veillé à l’application de la loi et à la protection des droits des membres. De plus, cette affaire démontre le rôle essentiel du système judiciaire marocain dans la protection des citoyens et dans la correction des injustices commises au sein des associations.
L’autre leçon à en tirer de cette affaire est l’importance d’être respectueux de la loi, des règlements et des autorités du pays au sein des clubs et associations. Il est primordial que ces entités se conforment aux lois du pays et respectent les droits des citoyens. En effet, les règles internes des clubs et associations doivent être en accord avec les lois et les réglementations en vigueur, et les dirigeants ne doivent pas utiliser les règlements intérieurs comme prétexte pour outrepasser la souveraineté nationale et les droits des individus. La dernière leçon est que le prix à payer est certes cher, mais démontre qu’un membre déterminé soucieux du respect de la légalité et les lois de son pays peut tenir tête à des dirigeants avec des valeurs différentes du véritable esprit Club.