Après le fiasco de Oued Chbika, Samih Sawiris s’offre la station d’Essaouira
Le tycoon égyptien Samih Sawiris, PDG d’Orascom Development Holding, dont le groupe a en charge l’aménagement et le développement de la station balnéaire de Oued Chbika au sud du Maroc depuis 15 ans, s’est engagé à nouveau à investir avec des coactionnaires 4 milliards de DH pour développer la station balnéaire d’Essaouira.
Samih Sawiris, chef de file d’un consortium comportant 4 investisseurs du Moyen-Orient, a récemment signé avec l’Etat marocain un mémorandum d’entente portant sur un programme d’investissement de plus de 4 milliards DH et 4.000 emplois à la clé pour la relance de la Société d’Aménagement de la Station Essaouira Mogador (SAEMOG), société qui porte la station balnéaire de Mogador-Essaouira. Si ce n’est pas tous les jours qu’on annonce un tel méga investissement dans leur secteur, la nouvelle a pourtant laissé pantois les professionnels du tourisme et le microcosme des affaires. Et pour cause, le projet du groupe du milliardaire égyptien en charge de l’aménagement et du développement de la station balnéaire Oued Chbika, située à 50 km au sud de Tan-Tan, fait quasiment du surplace depuis la signature de la convention d’investissement avec l’État marocain en 2007.
Alors que la station devait être livrée en 2015, rien ou presque n’a bougé depuis le premier coup de pioche en 2010. En effet, la station de Oued Chbika, qui devait s’étendre sur un total de 1500 hectares, devait connaître une première phase de développement sur 500 ha. À la clé, 8 hôtels totalisant une capacité de 5.000 lits, 2.000 unités résidentielles. Le site devait comprendre aussi une marina de 100 anneaux avec une petite ville en bord de mer qui s’étale sur 300 hectares. Il y est également prévu un golf de 18 trous, un centre sportif, des centres de loisirs et des commerces avec des enseignes nationales et internationales, le tout avec un cachet qui s’inspire des constructions locales sahariennes. La nouvelle ville balnéaire devait être conçue par un consortium d’architectes marocains et étrangers. Ils étaient invités à dessiner ensemble les 121 ryads qui constitueront une sorte de médina ainsi que les villas et les appartements du site. L’investissement requis pour la première tranche de 500 hectares s’élevait à 6,8 milliards de DH. Le premier hôtel devait ouvrir ses portes en 2012.
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Pourquoi le projet peine à sortir de terre depuis 15 ans ? La réponse est à chercher dans les interviews accordées par le magnat égyptien à la presse. Le cadet de la richissime fratrie égyptienne Sawiris (les autres frères Naguib et Nassef respectivement 8e et 5e au classement Forbes des milliardaires africains) estiment que les raisons sont nombreuses et ne dépendent pas de lui uniquement, les crises immobilière et financière ont découragé plusieurs autres investisseurs qui se sont désistés de leurs projets au Maroc. Il n’hésite pas à pointer du doigt les attentats de Marrakech qui, selon lui, ont été fatals pour son projet, puisque son partenaire français s’est tout simplement retiré du programme au lendemain de cet acte terroriste.
Lors de ses sorties médiatiques, quand il n’avance pas comme argument les lourdeurs procédurales, il invoque la crise financière de 2008 qui a rendu les banques plus frileuses quant au financement de ce genre de projet, et puis le Printemps arabe. « Samih Sawiris est un grand homme d’affaires. Ses sorties médiatiques sont toujours calculées. En distillant parcimonieusement ces types d’argument, il cherche à s’assurer que sa convention avec l’Etat demeure valable puisqu’au bout de 5 ans et en cas de non concrétisation des projets, le Maroc est en droit de récupérer les terrains concédés dans ce cadre. Il sait aussi qu’avec les nombreuses déconvenues enregistrées dans le cadre du Plan Azur, l’Etat réfléchirait deux fois avant de réclamer son foncier », analyse un fin observateur du secteur, notant que le PDG d’Orascom Development Holding, sachant qu’il n’est pas en position de faiblesse, a osé, du coup, lorgner la station balnéaire d’Essaouira malgré son fiasco à Oued Chbika, qui a vu passer pas moins de six ministres du Tourisme.
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Malgré tout, à l’instar du projet de la station balnéaire de Oued Chbika, Samih Sawiris voit à nouveau grand à Essaouira. Pour redynamiser la station Mogador, augmenter sa capacité d’accueil et son offre d’animation et par là, booster l’attractivité de la Cité du Vent sur l’échiquier des destinations touristiques internationales, il prévoit à travers le consortium la rénovation et l’extension de l’hôtel existant, la transformation de l’actuel club house en boutique hôtel ainsi que la construction d’un nouveau club house, le développement d’un Club Med et de 3 hôtels en front de mer, la création d’une zone commerciale et de loisirs dans le village de Mogador et son extension et le développement de projets immobiliers.
Il faut dire que le milliardaire sait bien que ses grands projets sur d’autres destinations dans le monde parlent pour lui. Son groupe a déjà fait ses preuves dans ce domaine des stations balnéaires en construisant, entre autres, la ville d’El Gouna sur la mer Rouge, à 450 kilomètres au sud-est du Caire. Depuis moins de trois ans, Samih Sawiris est devenu le principal actionnaire à hauteur de 75,1% du groupe de tour operating FTI, le troisième plus grand groupe en Allemagne (4ème Tour opérateur en Europe), après la faillite de Thomas Cook en 2019, et a généré un chiffre d’affaires de 3,2 milliards d’euros en 2019.