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BAD : les derniers chantiers d’Adesina

Aéroport en Éthiopie, soutien au développement du Lesotho et impulsion d’Ennova, le programme dédié aux entrepreneurs africains…

Alors que son mandat à la tête de la Banque africaine de développement (BAD) touche à sa fin, Akinwumi Adesina marque davantage son passage à la tête de l’institution internationale. Il s’emploie à consolider son héritage à travers une série d’initiatives stratégiques. Depuis son arrivée en 2015, l’économiste nigérian a axé son action sur le développement des infrastructures, l’industrialisation et l’appui au secteur privé. Aujourd’hui, il met les bouchées doubles pour finaliser plusieurs projets structurants, visant à renforcer la connectivité, stimuler l’entrepreneuriat et soutenir les économies du continent. Parmi les chantiers emblématiques de cette dernière ligne droite figurent l’appui au développement des infrastructures aéroportuaires en Éthiopie, un programme de soutien ciblé pour le Lesotho et le déploiement d’Ennova, une initiative ambitieuse dédiée aux entrepreneurs africains.

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Ces projets traduisent une volonté d’Adesina de positionner la BAD comme un acteur clé du développement socio-économique, en soutenant à la fois les grands équipements stratégiques et les initiatives locales à fort impact. Mais au-delà des annonces, la question demeure : ces projets auront-ils le temps de produire leurs effets avant un éventuel changement d’orientation sous une nouvelle présidence?

Un hub aéroportuaire en Éthiopie : renforcer la connectivité régionale

L’Éthiopie, qui ambitionne de devenir un centre de transport majeur en Afrique, bénéficie du soutien de la BAD pour la modernisation et l’expansion de ses infrastructures aéroportuaires. Ce projet s’inscrit dans une dynamique plus large visant à renforcer les corridors logistiques du continent. L’objectif est double : d’une part, améliorer la compétitivité d’Addis-Abeba en tant que hub aérien et, d’autre part, stimuler les échanges économiques en facilitant la circulation des biens et des personnes. Le financement de la BAD s’insère dans une stratégie de long terme où l’aviation est perçue comme un levier de développement économique. En soutenant ce projet, l’institution mise sur la capacité de l’Éthiopie à capitaliser sur sa position géographique stratégique et sur la montée en puissance d’Ethiopian Airlines, déjà leader en Afrique. Ethiopian Airlines, avec sa flotte de 140 appareils, dessert depuis son hub d’Addis-Abeba un réseau de 133 destinations passagers. Soit le transporteur déployant le plus de vols en Afrique.

Le Lesotho : un soutien économique ciblé

Contrairement aux grandes économies du continent, le Lesotho, enclavé au sein de l’Afrique du Sud, reste largement dépendant de l’aide internationale. La BAD a choisi d’y déployer un programme spécifique visant à diversifier l’économie locale et réduire sa vulnérabilité face aux chocs extérieurs. Cet appui se traduit par des investissements dans l’agriculture, les infrastructures et l’énergie, avec l’objectif de créer un tissu économique plus résilient.

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Selon le dernier rapport de la BAD, on constate que l’Afrique de l’Ouest (28 % des approbations) et l’Afrique de l’Est (22 % des approbations) concentrent la majeure partie de ces projets. Viennent ensuite l’Afrique du Nord (avec 18 % des approbations), suivie de l’Afrique australe (14 %) et enfin l’Afrique centrale (10 %). « Ce choix stratégique illustre une approche plus inclusive du développement : au lieu de concentrer ses efforts sur les géants économiques du continent, la BAD cherche à accompagner également les petits États dans leur transformation », nous confie l’économiste Mehdi Fakkir.

Ennova : l’autre chantier d’Adesina

L’une des initiatives phares de cette fin de mandat est le lancement d’Ennova, un programme dédié aux startups et aux entrepreneurs africains. Conçue comme une plateforme de soutien, cette initiative vise à apporter des financements, un accompagnement stratégique et un accès aux réseaux internationaux aux jeunes entreprises du continent. L’objectif d’Ennova est clair : favoriser l’émergence d’un écosystème entrepreneurial robuste et compétitif en Afrique, notamment dans les secteurs porteurs comme la tech, l’agriculture et les énergies renouvelables. La BAD entend ainsi jouer un rôle catalyseur dans la transformation économique du continent en misant sur l’innovation locale. Cependant, la réussite de ce programme dépendra de sa capacité à mobiliser des financements privés et à s’adapter aux réalités hétérogènes des marchés africains.

Une fin de mandat sous le signe de l’action

En accélérant ces chantiers, Adesina veut marquer son passage à la tête de la BAD par des initiatives concrètes. Mais ces projets auront-ils le temps de porter leurs fruits avant un éventuel changement de cap avec un nouveau président ? La question de la continuité des politiques engagées reste centrale, tant les défis structurels du continent nécessitent une vision de long terme. Si ces initiatives réussissent à s’inscrire dans une dynamique durable, elles pourraient façonner l’avenir économique de l’Afrique bien au-delà du mandat d’Adesina. Dans le cas contraire, elles risquent de rejoindre la liste des programmes ambitieux restés sans véritable impact. La BAD, plus que jamais, joue son rôle d’institution clé pour le développement africain, mais l’efficacité de ses choix stratégiques sera jugée sur les résultats à long terme.

 
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