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Coup de com’ ou rupture technologique? La superintelligence artificielle divise

Une intelligence artificielle (IA) pourrait-elle égaler, voire surpasser, l’humain? Cette perspective, portée par les plus grandes entreprises du secteur, divise la communauté scientifique mais certains experts pointent avant tout un argument marketing.

« Des systèmes qui tendent vers l’intelligence artificielle générale (« AGI » en anglais, une IA aux capacités cognitives équivalentes à celles des humains, NDLR) commencent à se dessiner », a assuré en février Sam Altman, le patron d’OpenAI, la start-up américaine à l’origine de ChatGPT.

Le patron d’Anthropic, un de ses concurrents, Dario Amodei, a lui indiqué que cela pourrait advenir dès l’année prochaine.

Cette possibilité d’une superintelligence artificielle alimente depuis plusieurs années fantasmes et peurs, et sert à justifier les centaines de milliards de dollars d’investissements à travers le monde pour des capacités de calcul toujours plus grandes.

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Pour le Français Yann LeCun, directeur scientifique pour l’IA chez Meta, si une intelligence artificielle générale finira sans aucun doute par naître, elle ne se fera toutefois pas avec les « techniques actuelles » fondées sur les grands modèles de langage, qui sous-tendent les robots comme ChatGPT, a-t-il dit à l’AFP en février.

Une opinion partagée par une majorité de scientifiques du secteur, selon une récente étude de l’Association pour le développement de l’intelligence artificielle (AAAI) aux Etats-Unis.

Pour d’autres experts, les propos des patrons d’entreprises d’IA, qui s’accompagnent parfois de mises en garde sur les risques que représenterait l’AGI pour l’humanité, correspondent surtout à une stratégie de communication.

Ces sociétés ont fait « d’énormes investissements et ils doivent porter leurs fruits », a expliqué à l’AFP Kristian Kersting, chercheur à l’université de technologie de Darmstadt en Allemagne et membre élu de l’AAAI.

« Leur discours consiste à dire: +C’est tellement dangereux que je suis le seul à pouvoir le gérer. En fait, j’ai moi-même peur mais on a déjà ouvert la boîte de Pandore, donc je vais me sacrifier pour vous -mais ensuite vous dépendrez de moi ».

Ce point de vue n’a toutefois pas gagné toute la communauté scientifique.

Des chercheurs de premier plan comme le prix Nobel de physique Geoffrey Hinton ou Yoshua Bengio, lauréat 2018 du prix Turing, alertent régulièrement sur les dangers d’une IA superintelligente.

« C’est un peu comme +L’Apprenti sorcier+ de Goethe. Vous avez une création que, soudainement, vous ne pouvez plus contrôler », a fait valoir Kristian Kersting, en référence à l’oeuvre du poète allemand où le personnage perd le contrôle d’un balai qu’il avait enchanté pour faire ses corvées.

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Néanmoins, pour M. Kersting, « la qualité et la diversité de l’intelligence humaine sont si remarquables que cela prendra beaucoup de temps, si cela arrive un jour », avant que les ordinateurs ne parviennent à l’égaler.

Les dommages causés aux humains par les IA existantes, comme les cas de discriminations dus à des biais, sont bien plus préoccupants pour ce professeur.

Même si les pronostics de Sam Altman et Dario Amodei sur l’échéance à laquelle émergera une superintelligence artificielle semblent « assez optimistes », « nous devrions envisager cela et le prendre au sérieux parce que ce sera la plus grande chose qui pourrait arriver », a jugé auprès de l’AFP Sean O hEigeartaigh, directeur du programme « IA: Futurs et Responsabilité » à l’université de Cambridge en Grande-Bretagne.

« S’il s’agissait de n’importe quoi d’autre -un débarquement des extraterrestres d’ici 2030 ou une nouvelle grosse pandémie-, nous passerions du temps à nous préparer », a-t-il ajouté, le défi consistant à sensibiliser le grand public à ce sujet.

Les discussions sur une super IA « créent instantanément une sorte de réaction épidermique… On a l’impression que c’est de la science-fiction », a regretté Sean O hEigeartaigh.

Challenge (avec AFP)

 
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