Edito. Le Maroc a soif
La première soif de la majorité des Marocains est au sens propre du terme. Elle concerne l’eau potable, de plus en plus rare, menacée par le réchauffement climatique dont les causes sont mondiales, mais aussi par le gaspillage et la surexploitation. Prise de conscience, nouveaux comportements et nouvelles pratiques de consommation d’eau, aux niveaux individuel et collectif, sont indispensables pour faire face au stress hydrique sévère, voire extrêmement fort, qui sévit actuellement en Afrique du Nord.
Au Maroc, la quantité moyenne d’eau disponible, par an et par habitant, est passée de 2 560 mètres cubes, en 1960, à 600 mètres cubes aujourd’hui. En 2030, cette moyenne devra baisser à 500 mètres cubes, si des mesures urgentes ne sont pas prises et appliquées. Sans eau, la vie ne serait plus possible, pour toute espèce vivante. Sa raréfaction chronique est source de menaces, d’instabilité et de conflits. Abderrahim El Hafidi, ce pur produit du système éducatif marocain, directeur général de l’ONEE, sait de quoi il parle. Gérant, en temps de crises, ce couple physiquement inconciliable, constitué par l’eau et l’électricité, il a su, avec ses équipes, faire preuve de génie pour atténuer les chocs induits aussi bien par la sécheresse que par la hausse des matières premières indispensables à la production de l’énergie électrique. Mais, aujourd’hui, des réformes radicales s’imposent.
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L’évolution du coût réel de l’eau potable dépendra de plusieurs facteurs, parmi lesquels il y a lieu de citer la révision des politiques publiques de l’eau, l’innovation technique, le développement des énergies renouvelables mobilisées dans le dessalement de l’eau de mer, mais aussi et surtout le changement radical dans les modes de consommation d’eau, dans tous les secteurs, y compris les ménages.
Mais la soif des marocains va bien au-delà de l’eau potable, bien que celle-ci soit vitale. Cette soif s’étend aussi au savoir, à la formation, à l’inclusion économique et sociale et à la reconnaissance morale, en tant que citoyens libres, actifs et responsables. Chaque année, des centaines de milliers de jeunes lycéens passent leurs épreuves de baccalauréat, avec des rêves et des ambitions. Quelles perspectives après l’obtention de titre de bachelier ? L’inauguration de la Cité des métiers et des compétences de Rabat-Salé-Kenitra par le Souverain, dans une zone quasi-rurale, est une réponse hautement symbolique, pour l’ensemble des régions, à cette soif légitime qui concerne des milliers de jeunes ayant besoin de stabilité matérielle et morale, et surtout d’espoir. La réponse à cette soif là est fondamentale pour redonner confiance en soi.
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L’autre soif permanente que l’on observe dans les luttes et sacrifices quotidiens des familles, est relative à une véritable égalité des chances, à la consécration effective du mérite, comme unique critère de promotion sociale, sans oublier la justice sociale qui est au cœur du nouveau contrat social en difficile gestation, préalable nécessaire à la construction d’un Maroc solidaire. La liberté ne devrait pas faire peur, lorsqu’elle est intimement liée à la responsabilité, pour exprimer ainsi une « maturité sociétale », où le concept de démocratie reçoit toute sa substance première, décliné à travers tous les processus de décision dans la vie publique. Par