Gouvernance

Entreprises publiques : un gouffre financier à réformer en urgence

Dans son rapport annuel 2023-2024, la Cour des Comptes consacre un chapitre détaillé à la situation préoccupante des entreprises et établissements publics (EEP), soulignant la nécessité d’accélérer les réformes structurelles pour garantir une gestion plus efficace et réduire le poids financier sur l’État.

La Cour note que de nombreuses entreprises publiques continuent de dépendre fortement des transferts de l’État pour fonctionner, ce qui pèse sur les finances publiques. Les subventions, souvent allouées sans mécanismes de suivi rigoureux, représentent une charge croissante. En 2021, les transferts financiers ont atteint 4,33 milliards de dirhams, principalement pour couvrir des déficits structurels persistants​.

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Cette dépendance budgétaire s’explique par des problèmes récurrents de gouvernance, de rentabilité insuffisante et par la lenteur dans la mise en œuvre des réformes prévues par le cadre législatif, notamment la loi n° 50.21 sur la restructuration des EEP​.

Une réforme qui tarde à se concrétiser

Annoncée en 2020, la réforme des entreprises publiques vise à réduire la taille du portefeuille public et à rationaliser les missions de ces entités. L’objectif principal est d’éliminer les chevauchements de fonctions et d’améliorer l’efficacité. Pourtant, la Cour déplore que cette restructuration reste partiellement réalisée. Au cours des cinq dernières années, seules quatre opérations de privatisation ont été concrétisées, un chiffre bien en deçà des ambitions fixées​.

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Certains secteurs-clés, comme l’eau et l’énergie, montrent des difficultés financières structurelles. La Cour révèle que les indicateurs de rentabilité de plusieurs établissements ont enregistré une dégradation notable. Par exemple, les entreprises chargées de la distribution de l’eau affichent des pertes nettes dépassant 910 millions de dirhams en 2022. Ce constat inquiète d’autant plus que ces secteurs jouent un rôle essentiel dans la transition économique et sociale du pays​.

Recommandations pour une gouvernance plus efficiente

Pour améliorer la performance des entreprises publiques, la Cour des Comptes propose des mesures concrètes :

  • Accélérer la restructuration du portefeuille public afin de recentrer les missions sur les activités stratégiques.
  • Renforcer les mécanismes de suivi et d’évaluation des subventions accordées aux EEP pour assurer une meilleure transparence.
  • Améliorer la rentabilité à travers l’adoption de plans de redressement pour les entreprises déficitaires.
  • Accélérer les opérations de privatisation prévues pour réduire la charge financière de l’État et attirer des capitaux privés.

Un enjeu majeur pour les finances publiques

La situation des entreprises publiques est un levier central dans la stratégie budgétaire du Maroc. En renforçant la gouvernance, en réduisant les déficits et en optimisant les performances, ces entités peuvent devenir des acteurs majeurs du développement économique au lieu d’être un poids financier pour l’État. La Cour rappelle que la réussite de ce chantier est indispensable pour garantir la soutenabilité des finances publiques à moyen et long terme.

 
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