Hicham Bensaid Alaoui: « La politique volontariste de l’Etat semble en passe d’offrir des opportunités concrètes à de nombreuses entreprises marocaines»
Tour d’horizon avec Hicham Bensaid Alaoui, CEO d’Allianz Trade sur les faits marquants économiques ainsi que le bilan de l’année 2023, mais aussi les perspectives économiques 2024. En effet, selon l’Expert, le bilan n’a pas été des plus reluisants et les perspectives ne seront guère brillantes ! Explications.
Challenge : Quel bilan économique faites-vous de cette année 2023 ? Dans ce sens, quels sont les événements à caractère économique au Maroc et dans le monde qui ont surtout retenu votre attention ? Pourquoi ?
Hicham Bensaid Alaoui : 2023 a été objectivement une année difficile et éprouvante, avec une croissance économique de l’ordre de 3% -ce qui demeure insuffisant pour prétendre à l’émergence-, et une des pires sécheresses de notre histoire, avec en point d’orgue le drame du séisme d’Al Haouz. Ces éléments, couplés aux chocs extérieurs que nous connaissons tous, ont abouti à une inflation de l’ordre de 4% en 2023, certes en diminution par rapport aux niveaux historiques de 2022 (autour des 7%), mais se situant encore à des standards sensiblement supérieurs aux moyennes d’avant-Covid.
C’est dans cette logique que selon le baromètre des défaillances d’entreprises d’Allianz Trade, ces dernières ont augmenté de 6% en 2023 au niveau mondial, là où la tendance était à la décroissance ou à la stagnation depuis 3 ans (-16% en 2020, -13% en 2021, 1% en 2022).
Challenge : Estimez-vous que les entreprises ont été bien soutenues cette année par l’Etat ? Quels types de soutien faudrait-il aux entreprises en 2024 ?
H.B.A. : L’Etat a eu à gérer un certain nombre de chantiers structurants en 2023. Certains, planifiés et annoncés en amont, à l’image de la volonté de refonte des systèmes éducatif et de santé, ont mobilisé des moyens conséquents, matérialisés notamment par le prêt d’un demi-milliard de dollars octroyé en juin dernier par la Banque Mondiale afin de favoriser la réforme du système de santé, sans éluder le sujet de l’enseignement, dont les projets de réforme sont d’une actualité malheureusement prégnante.
D’autres chantiers, tel le contre-coup du drame d’Al Haouz et ses 11 milliards de dollars alloués à la reconstruction et à la revalorisation des zones sinistrées, sont venus s’y adjoindre, réduisant mécaniquement les budgets disponibles. Dans un tel contexte, les entreprises marocaines ne peuvent pas se targuer d’avoir bénéficié d’incitations fiscales exceptionnelles ou de subsides notables (exception faite de certains secteurs, tel celui des transporteurs ou des maraîchers par exemple), même si les aides directes aux ménages ont mécaniquement permis de rééquilibrer leur pouvoir d’achat, ruisselant mécaniquement sur les entreprises.
Au titre de 2024 et des années suivantes, je pense que la politique volontariste de l’Etat marocain, à travers un certain nombre de projets de grande envergure (autoroutes de l’eau, lignes ferroviaires à grande vitesse, stations de dessalement, voies rapides, investissements en lien avec la Coupe du Monde de football…), semble en passe d’offrir des opportunités concrètes à de nombreuses entreprises marocaines, qui devraient ainsi renchérir leurs carnets de commande.
Challenge : Quelles leçons les jeunes patrons et le Maroc devraient-ils tirer de l’année 2023 ?
H.B.A. : Je pense que s’il devait y avoir une leçon à tirer, c’est que l’Etat marocain est appelé à gérer un certain nombre de défis structurants, qu’il s’agisse de thématiques sécuritaires, brillamment maîtrisées par ailleurs, ou celles liées à la reconstruction des zones sinistrées par le sinistre d’Al Haouz, sans oublier les réformes annoncées de l’éducation et de la santé. De ce fait, à mon sens, certains jeunes patrons doivent chercher à s’affranchir davantage d’une certaine idéologie keynésienne, afin de prendre davantage leur avenir en main. En substance, ‘’aide-toi, le ciel t’aidera’.
Challenge : Quid des perspectives en 2024 pour l’économie marocaine et dans le monde?
H.B.A. : Guère brillantes ! La Banque mondiale anticipe ainsi une 3e année consécutive de récession, le Maroc, avec ses 3.1% de croissance escomptés en 2024, surperformant faiblement la moyenne mondiale. Espérons que les chantiers précédemment évoqués sauront marquer les prémices d’une nouvelle dynamique économique, dans une conjoncture, certes, très délicate.
Son parcours
Hicham Bensaid Alaoui est le CEO d’Allianz trade Morocco ( By Euler Hermes Acmar), leader mondial en assurance-crédit. L’Expert a, à son actif un diplôme d’Expertise comptable de l’Etat Français et un Master grande école d’Audencia Nantes School of Management. Avant d’occuper son poste actuel, Hicham Bensaid Alaoui occupait le poste de Directeur des risques de l’information, des sinistres de l’information et du recouvrement.
Son Actu
La croissance n’a jamais fait autant débat. L’économie a connu de grands événements qui ont fortement impacté le développement de sa croissance et les choses ne semblent pas vouloir s’arranger pour l’année 2024. En effet, la conjoncture économique est, selon les différentes lectures des experts, très délicate. Une année semée de doute et dont la croissance évoluera au grès du vent des événements importants à venir. A suivre !