Immobilier : Les grands défis de 2025
En 2024, l’immobilier n’est pas arrivé à trouver son équilibre. D’ailleurs, les acteurs du secteur sont également confrontés à des défis endogènes. Le président de la Fédération des agents immobiliers fait le point sur la situation.
Le marché immobilier marocain se trouve à un tournant crucial en 2025. Alors que l’année précédente a été marquée par une demande croissante, portée par une urbanisation rapide et une classe moyenne en quête de logements, l’offre, elle, peine à suivre.
Cette inadéquation entre l’offre et la demande a entraîné une flambée des prix, rendant l’accès à la propriété de plus en plus difficile pour de nombreux ménages.
Selon une récente étude de Mubawab.ma, ce déséquilibre persistant n’est pas uniquement conjoncturel, mais s’inscrit dans une dynamique structurelle qui mérite une analyse approfondie.
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Rappelons d’ailleurs que, selon les dernières données communiquées par Bank Al-Maghrib et l’Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie (ANCFCC), les transactions sur le résidentiel se sont contractées de 17,3 % au premier trimestre de l’année, recouvrant des baisses de 17,5 % pour les appartements, de 18 % pour les maisons et de 4,2 % pour les villas.
« Aujourd’hui, le constat, au demeurant amer, est qu’il y a beaucoup de stocks sur le marché depuis quelques années. Cela prouve que la demande est rare. Cette crise touche presque tous les segments, le neuf comme l’ancien, à l’exception du résidentiel de luxe qui trouve toujours preneur », a indiqué, dans une rencontre avec Challenge, Mohamed Lahlou, président de l’Union régionale des agences immobilières (URAI) Casablanca-Settat.
Les causes endogènes du mal…
Pour le président de l’URAI, deux principaux facteurs expliquent cette situation : le recul du pouvoir d’achat des ménages, touché par la hausse de l’inflation, et la hausse du coût du crédit bancaire.
Dans les détails, en 2024 par exemple, il faut noter que le taux moyen appliqué aux crédits immobiliers ressortait à 4,36 % au premier trimestre de l’année, selon Bank Al-Maghrib.
Durant la même période, les banques ont déclaré que les critères d’octroi des crédits ont été durcis pour les prêts à l’habitat, alors qu’ils sont restés inchangés pour les crédits à la consommation.
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« D’un côté, les taux d’intérêt ont augmenté et les banques ne financent plus les acquisitions immobilières à 100 %, et, de l’autre, la baisse du pouvoir d’achat rend l’épargne presque impossible pour les ménages. Il est difficile de relancer le marché de l’immobilier dans ces conditions », alerte notre interlocuteur.
De plus, selon Lahlou, on a dans ce contexte des prix très élevés en raison de la bulle inflationniste qui pèse sur le marché.
Quelle alternative pour sortir du marasme ?
Dans un marché de l’immobilier complexe, l’État, ces dernières années, n’est pas resté indifférent.
« Le projet de l’aide au logement représente aujourd’hui une alternative », explique Lahlou.
« Mais pas que, le gouvernement pourrait aussi revoir la fiscalité, notamment la baisse des frais d’enregistrement, faire payer la TPI, recouvrer les terrains non bâtis… »
S’étendant sur la période 2024-2028, le montant de l’aide a été fixé à 100.000 dirhams pour l’acquisition d’un logement dont le prix de vente est inférieur ou égal à 300.000 dirhams TTC.
L’aide proposée sera, par ailleurs, de 70.000 dirhams pour l’acquisition d’un logement dont le prix est compris entre 300.000 et 700.000 dirhams TTC, explique le communiqué du Cabinet Royal.
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Contactée par Challenge, Zakia Medkor, responsable souscription risques techniques chez Allianz Maroc, déclare :
« Les remèdes que l’on pourrait proposer devraient normalement se focaliser sur le redressement des problèmes actuels. Mais je pense qu’il faudrait se concentrer sur le renforcement de la demande en priorité :
- En redonnant confiance aux consommateurs dans la qualité des biens construits, y compris pour les produits économiques, à travers la mise en place du Code de Construction et en veillant à son application.
- À travers la mise en application de la loi d’obligation d’assurance pour les chantiers de construction et la responsabilité civile décennale.
- En prolongeant (et pourquoi pas en instaurant) la réduction sur les frais d’enregistrement et d’immatriculation pour l’acquisition des biens éligibles.
- En mettant en place des incentives au profit des acquéreurs (fluidité administrative, aides, etc.), notamment pour les primo-accédants.
- En mettant en place des conventions de garantie avec les banques visant à soutenir la baisse des taux d’intérêt des emprunteurs.
- À travers la subvention et le développement d’un produit adapté en termes de coût, de besoin et de financement des différentes tranches sociales, notamment la classe moyenne. »
Toujours dans le sens des solutions pour dynamiser le secteur, le président de l’URAI est revenu sur l’urgence de l’émergence d’un cadre réglementaire pour l’intermédiation immobilière.
« C’est depuis le 14 février 2014 que nous avons proposé le projet de loi, et, depuis 2017, le dossier est au secrétariat du gouvernement. »
« Il est urgent d’activer le projet de loi concernant notre profession, car les agents immobiliers seront amenés à accompagner les futurs acquéreurs dans le cadre du nouveau programme d’aide au logement, et on ne peut permettre à n’importe qui d’assurer cette intermédiation. »
Il faut d’ailleurs rappeler que ce chantier est l’un des défis du nouveau mandat du président de l’Union régionale des agences immobilières (URAI) Casablanca-Settat.
Ce métier attire de plus en plus de nouveaux entrants, en particulier des étrangers, qui travaillent avec les concierges, souvent sans registre de commerce.
L’international : une bouée de sauvetage
Ces dernières années, les promoteurs immobiliers ont vu dans l’international une alternative pour échapper au marasme économique qui pèse sur le secteur.
« Cela fait plusieurs années que les grandes entreprises marocaines, y compris immobilières (Addoha, Alliances, Palmeraie, etc.), ont de l’appétit pour le développement dans le continent, d’autant plus guidées par la volonté du pays de s’ouvrir sur l’Afrique subsaharienne.
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La plupart des pays africains affichent une promesse de croissance élevée, avec une demande de logements accrue, ce qui représente une bonne opportunité de développement pour les promoteurs.
La présence d’un réseau bancaire marocain riche dans des pays comme la Côte d’Ivoire, le Sénégal, le Ghana, etc., devrait booster davantage l’activité », explique l’experte d’Allianz Maroc.
Par exemple, pour le groupe Addoha, longtemps impacté par les turbulences économiques (conjoncture immobilière) liées au secteur, le groupe, depuis 2018, sous la houlette de son PDG, avait décidé de mettre le cap sur le continent africain afin de renouer avec la croissance. Le pari a été réussi !
« Dans cette région du continent, le niveau des préventes réalisées par le groupe a atteint plus de 1.700 unités, ce qui permet de sécuriser d’ores et déjà un chiffre d’affaires de près de 900 millions de dirhams sur les deux années à venir », explique le groupe dans un communiqué publié en 2021.