Investissement A Essaouira, le marketing territorial à coups de milliards
Des investissements de plusieurs milliards de dirhams annoncés en marge de l’Essaouira Investor Day promettent d’insuffler une nouvelle dynamique dans la cité des Alizés, trop longtemps tributaire du tourisme.
«A ce jour, Essaouira n’a jamais compté en milliards, là on compte en milliards», n’a cessé de marteler André Azoulay, Conseiller du Roi Mohammed VI, face à une audience réceptive composée de décideurs, représentants d’institutions publiques et privées, ainsi qu’aux différents organes de presse présents à l’Essaouira Investor Day. Cet événement, orchestré par le Centre Régional d’Investissement de Marrakech-Safi et la Société financière internationale (IFC), ambitionne de drainer des investissements privés massifs dans la province, dans la lignée des efforts engagés dans la région et son épicentre Marrakech, mais aussi à Safi et Rhamna.
Au cœur de ces investissements conséquents figure le projet de station balnéaire Mogador dont l’enveloppe annoncée s’élève à 6,2 milliards de dirhams, bien au-delà des 4 milliards initialement prévus. L’offre touristique est renforcée par un programme d’investissement de 2 milliards de dirhams prévu par le Conseil Régional dans le cadre du Plan de Développement Régional (PDR), qui se répartissent entre la Cité des Arts et de la Culture en cours de réalisation (350 millions de dirhams), l’aménagement de la route littorale qui absorbe 380 millions de dirhams, et l’amélioration de l’accès à l’eau dans le milieu rural et aménagement des forêts urbaines bénéficiant d’une enveloppe de 217 millions de dirhams. S’y ajoute, l’aménagement de la zone industrielle de Douar Laarab, présenté comme un élément central de la stratégie de redynamisation urbaine, et qui prévoit la délocalisation de l’ancienne zone industrielle.
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En effet, Essaouira, qui compte à ce jour un unique quartier industriel historique, désormais obsolète en raison du développement urbain de la ville, doit relocaliser ses activités industrielles en raison de l’urbanisation croissante et de l’inadéquation des infrastructures existantes. L’opération est jugée risquée pour certains observateurs et les quelques nostalgiques de l’ancien quartier industriel.
Un retour sur investissement de 4 DH par dirham investi
La contribution du secteur privé s’avère tout autant non négligeable dans la mise en branle de cette dynamique. En marge de ce forum dédié à l’investissement, plusieurs conventions ont été signées avec des entreprises prometteuses, en vue d’accompagner le lancement de la zone d’activité économique de Douar Laarab. Cette zone, prévue sur une superficie de 22 hectares, prévoit près de 150 lots destinés aux industriels. L’impact attendu est significatif. Selon les estimations du CRI de Marrakech-Safi, chaque dirham dépensé pour la mise en place de la zone générera à terme un investissement privé de quatre dirhams.
Il faut dire que des opérateurs ont d’ores et déjà franchi le pas, comme Gigalab, spécialisée dans la production de tests et l’assemblage d’équipements de laboratoire, qui s’est engagée à investir 120 millions de dirhams, générant ainsi la création de 185 emplois. LC2A, orientée vers les analyses de biologie médicale spécialisée et l’antidopage, prévoit un investissement de 223,5 millions de dirhams, aboutissant à la création de 193 emplois. De son côté, EMVC, entreprise dédiée à la fabrication de véhicules électriques, a annoncé un investissement de 50 millions de dirhams, entraînant la création de 69 emplois. Gold Cosmetic, engagée dans la production de plantes aromatiques et médicinales, ainsi que de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle, investira 51,6 millions de dirhams pour créer 70 emplois. Par ailleurs, Mogador Pharma, focalisée sur la production de produits pharmaceutiques, dispositifs médicaux et compléments alimentaires, investira une somme substantielle dans cette nouvelle initiative. Pour sa part, Conmedic-Groupe, destiné à la production d’équipements et dispositifs médicaux, a officialisé son engagement financier (314 millions de DH), promettant des retombées significatives en termes d’emploi.
Tourisme, mon amour !
Ces initiatives s’inscrivent dans un effort concerté de diversifier l’économie locale. Essaouira, avec 80% de ses activités locales tributaires du tourisme, est profondément dépendante de cette industrie. Sur les six premiers mois de l’année, « un million de nuitées ont été enregistrées entre janvier et juin», selon André Azoulay. Ce chiffre reflète un rebond impressionnant du tourisme à Essaouira, surpassant les niveaux de 2023 et témoignant de l’attractivité renouvelée de la ville. La popularité croissante d’événements tels que le Festival de Musique Gnaoua et les activités nautiques ont largement contribué à cette hausse significative. En dehors du tourisme, la pêche reste un secteur clé pour la ville. Elle génère un volume d’affaires important et occupe près de 5.000 personnes. L’agroalimentaire est également un pilier essentiel de l’économie locale, avec des huileries, minoteries et unités de conservation de poissons contribuant significativement à l’économie.
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Avec la délocalisation des filières industrielles dans l’arrière-pays, l’objectif double est de permettre à la ville de se concentrer sur sa vocation touristique, tout en désenclavant la zone industrielle. C’est à l’image de ce modèle que la ville souhaite développer son nouveau paradigme de croissance: un modèle résilient et endogène. Pour la petite histoire, malgré tous les défis auxquels la ville fait face, Essaouira affiche cette année l’un des plus hauts taux de réussite au baccalauréat – 97%. En l’absence de réelles opportunités économiques, la plupart de ces jeunes sont condamnés à l’exil. «Tous ces jeunes qui arrivent, il ne faut pas qu’ils quittent leur terroir, il faut leur donner les moyens de réussir», clame Farid Chourak, Wali de la région Marrakech-Safi.
Une station balnéaire à 6 milliards de DH!
Le montant d’investissement du projet ambitieux de la station balnéaire de Mogador, s’élève désormais à 6,2 milliards de dirhams, contre 4 milliards annoncés initialement. Une cérémonie d’inauguration, prévue en septembre prochain, réunira décideurs et représentants d’institutions publiques et privées pour marquer cette étape clé. «C’est le fruit d’un travail de quatre ans», souligne André Azoulay, Conseiller de Sa Majesté le Roi Mohammed VI. Ce projet de grande envergure transformera Mogador en un pôle touristique majeur. Les retombées économiques attendues sont significatives, avec la création de milliers d’emplois et l’attraction de nouveaux visiteurs à Essaouira. Il promet de redéfinir le paysage touristique régional, renforçant ainsi l’attrait du Maroc comme destination de choix.