Investissement : Le bilan d’étape de Karim Zidane

Un an après son entrée en vigueur, la nouvelle Charte de l’investissement 2024 affiche un premier bilan prometteur. Elle a contribué à redynamiser l’économie, à renforcer l’équité territoriale et à multiplier les projets d’investissement, confirmant ainsi les ambitions initiales. Toutefois, au-delà des indicateurs positifs, des défis majeurs subsistent, notamment en ce qui concerne l’accès au financement pour les TPME et la simplification des démarches pour les investisseurs. Décryptage.
Depuis son entrée en vigueur en 2024, la nouvelle Charte de l’investissement s’est imposée comme un instrument clé pour relancer l’attractivité économique du Maroc. Conçue pour stimuler les investissements nationaux et étrangers, elle vise à renforcer l’équité territoriale, favoriser la création d’emplois et diversifier les secteurs porteurs. En une année, les premiers indicateurs sont encourageants : hausse du nombre de projets validés, augmentation des capitaux engagés et consolidation de la position du Maroc comme hub régional. Cette réforme ambitionne de créer un environnement plus compétitif et incitatif pour les entreprises, en simplifiant les procédures administratives et en offrant des avantages fiscaux attractifs. Dans un contexte de concurrence accrue avec d’autres économies émergentes, elle constitue un atout stratégique pour accélérer la transformation du tissu productif national. Rappelons que le challenge en ligne de mire est celui d’atteindre 550 MMDH d’investissements privés et 500 000 emplois à l’horizon 2026.
Selon le bilan d’étape, Karim Zidane, ministre délégué à l’Investissement, a révélé que depuis la mise en place de la Charte, sept commissions nationales d’investissement ont approuvé 191 projets, dont 167 portés par des entreprises privées nationales et étrangères. Ces initiatives représentent un investissement total de 326 milliards de dirhams et généreront environ 150 000 emplois directs et indirects. Parmi les projets d’envergure, 12 initiatives stratégiques ont été approuvées par la Commission nationale d’investissement (CNI), totalisant 78 milliards de dirhams d’investissements et prévoyant la création de plus de 60 000 emplois. En termes de répartition territoriale, la région de Casablanca-Settat concentre le plus grand nombre de projets (55), suivie de Tanger-Tétouan-Al Hoceïma (40).
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Toutefois, derrière ces avancées chiffrées, des défis persistent et viennent tempérer cet élan. L’accès au financement demeure une problématique centrale, notamment pour les TPME, qui représentent l’essentiel du tissu économique. Par ailleurs, la complexité des démarches administratives d’investissement reste un obstacle majeur pour les entrepreneurs.
Le pari sera-t-il relevé ?
« La tâche est épineuse et aucun gouvernement ne peut, en l’espace d’un quinquennat, transformer un pays. L’objectif quantifiable d’égaler l’investissement public n’est pas un objectif du gouvernement, mais il émane de la feuille de route royale pour inverser les ratios entre investissement public et investissement privé. Aujourd’hui, c’est 2/3 pour le public et 1/3 pour le privé. Sa Majesté le Roi a, dans plusieurs discours, appelé à sortir d’une croissance tirée par la demande intérieure et d’une création d’emplois dépendant de la demande publique, financée par les déficits budgétaires et par une dette essentiellement intérieure, financée par nos banques », soutient l’économiste Abdelghani Youmni.
Et d’ajouter : « Le changement de paradigme doit amener nos investisseurs à se jeter dans l’arène de l’industrie et à ne plus considérer l’entrepreneuriat comme un accélérateur de la rente, mais comme un propulseur du développement industriel, culturel et managérial. C’est ce qui nous différencie aujourd’hui des Turcs, des Malaisiens, des Vietnamiens et des Sud-Coréens ».
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De son côté, le CEO du groupe Guépard, Abdelmalek Alaoui, lance un appel aux élites : « Les investisseurs nationaux ont parfois le sentiment qu’ils ne sont pas suffisamment écoutés. L’économiste Lawrence Summers a résumé l’enjeu dans une formule lumineuse : « Les États doivent organiser leurs systèmes de manière à ce que les nationaux investissent dans leur pays. » », a-t-il conclu.
Réinvestissement des IDE : un potentiel sous-exploité !
Selon une récente étude du Policy Center for the New South (PCNS) intitulée « Réinvestissement des IDE au Maroc », le taux de réinvestissement au Maroc reste loin de la moyenne mondiale. « L’amélioration du climat des affaires ainsi que l’adoption des stratégies sectorielles orientées vers l’export ont encouragé de nombreuses firmes multinationales à s’installer au Maroc. Le stock des IDE est ainsi passé de 10 milliards de dollars en 2000 à 73 milliards de dollars en 2021, soit une croissance annuelle moyenne de 10 % », soulignent les rédacteurs du rapport.
Cependant, la lecture des données sur les revenus des IDE au Maroc révèle que les investisseurs directs sont moins enclins à réinvestir les bénéfices collectés et préfèrent rapatrier leurs dividendes. Ceux-ci représentent une part moyenne de 75 % durant ces deux dernières décennies. La part des bénéfices réinvestis demeure faible et ne dépasse pas 20 %, bien en dessous des moyennes constatées ailleurs dans le monde, présentant ainsi un manque à gagner pour l’économie marocaine.