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La France hausse le ton et menace l’Algérie de sanctions

« L’Algérie cherche à humilier la France » : le renvoi vers Paris d’un influenceur algérien expulsé vers son pays a suscité vendredi la colère du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau et envenimé des relations franco-algériennes déjà tendues.

Trois Algériens et une Franco-algérienne ont été récemment interpellés pour avoir mis en ligne des contenus haineux envers la France, incitant notamment à « brûler vif, tuer et violer », tout en appelant à des actes violents, souvent à l’encontre d’opposants au régime algérien.

« On a atteint avec l’Algérie un seuil extrêmement inquiétant », a estimé M. Retailleau, un des poids lourds du gouvernement de François Bayrou et figure issue de la droite souverainiste et réputé pour sa ligne hostile à l’immigration.

« Je pense que la France ne peut pas supporter cette situation », a-t-il encore dit, en appelant à « évaluer tous les moyens qui sont à notre disposition vis-à-vis de l’Algérie » pour « défendre nos intérêts ».

Alors que le président français Emmanuel Macron avait entamé en 2022 un « rapprochement » avec l’Algérie sur « la question du passé colonial », les sujets de tensions se sont accumulés entre les deux pays, partenaires au niveau économique et sécuritaire.

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« Doualemn », influenceur de 59 ans, avait été interpellé à Montpellier dans le sud de la France, après une vidéo litigieuse sur TikToK puis mis dans un avion jeudi après-midi pour l’Algérie d’où il a été renvoyé en France le soir même, l’Algérie l’ayant « interdit de territoire », selon le ministère de l’Intérieur.

« J’ai pris un arrêté d’expulsion et les autorités algériennes n’ont pas voulu le laisser débarquer sur le sol algérien en contradiction totale avec les règles », a affirmé M. Retailleau.

Selon lui, les arguments fournis côté algérien à l’escorte policière française ne tiennent pas : « il n’y avait pas besoin d’avoir un laissez-passer consulaire puisque la preuve qu’il était un ressortissant algérien était établie au moyen d’un passeport biométrique valide », a affirmé le ministre.

L’influenceur a été replacé dans la soirée en centre de rétention administrative en région parisienne.

Dans sa vidéo, « Doualemn » appelait à « donner une sévère correction à un homme semblant résider en Algérie », avait précisé mardi le procureur de la République de Montpellier, Fabrice Belargent.

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Selon plusieurs opposants algériens en France, interrogés par l’AFP, ces messages se sont intensifiés après que la France a changé de doctrine sur le Sahara marocain.

Le président Emmanuel Macron s’est aligné fin juillet sur l’Espagne et les Etats-Unis, estimant que l’avenir du Sahara occidental s’inscrivait « dans le cadre de la souveraineté marocaine ». Ce qui a causé un réchauffement avec Rabat et une nouvelle crise avec Alger.

Autre sujet de tension, l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal, 75 ans, malade, est incarcéré depuis mi-novembre en Algérie pour atteinte à la sûreté de l’Etat.

« Est-ce qu’un grand pays peut s’honorer de maintenir en détention pour de mauvaises raisons quelqu’un qui est malade et âgé ? », a estimé M. Retailleau, paraphrasant des propos du président Emmanuel Macron déjà réprouvés par l’Algérie.

« L’Algérie que nous aimons tant et avec laquelle nous partageons tant d’enfants et tant d’histoires entre dans une histoire qui la déshonore, à empêcher un homme gravement malade de se soigner. Ce n’est pas à la hauteur de ce qu’elle est », avait dit M. Macron devant les ambassadeurs français réunis à l’Elysée.

Une « immixtion éhontée et inacceptable dans une affaire interne algérienne », a réagi le ministère algérien des Affaires étrangères.

En déplacement à Nantes (ouest), siège du service central d’Etat civil, M. Retailleau a aussi annoncé qu’il souhaitait à l’avenir que la France délivre « moins de visas ».

Les visas, bien sûr, c’est un élément de l’influence de la France, mais c’est aussi un élément de la maîtrise de l’immigration », a-t-il déclaré.

« Je souhaite qu’on puisse surveiller de très très près les 20 postes consulaires qui sont à l’étranger et qui distribuent l’essentiel du nombre des visas pour la destination France », a-t-il plaidé.

Challenge (avec AFP)

 
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