Le petit musée de la Fondation Abdelouahab Doukkali : Pour la mémoire…du futur !
Publication du premier tome de « brin de ma vie, trilogie d’art et d’amour », en version arabe et français, et mise sur pieds de « Le petit musée »… Abdelouahab Doukkali étale et dévoile son parcours pour le grand plaisir de ses fans.
L’histoire des arts au Maroc reste à écrire. Théâtre, cinéma, folklore, musique…Un riche et varié patrimoine matériel et immatériel qui reflète les diverses strates d’une civilisation millénaire. Une mosaïque aux affluents nombreux, aux identités multiples qui fait de notre béni pays une exception de par le monde. Hélas, l’histoire et les figures incontournables de ces pans de culture et de mémoire risquent de sombrer dans l’oubli. De là l’importance de la réhabilitation, de la sauvegarde de notre riche culture. Des initiatives telles que celle du musée Abderrahmane Youssoufi à Casablanca, Fondation Hamidou Ben Messaoud à Rabat, l’Atelier Houssein Miloudi à Essaouira… sont les bienvenues. L’initiative de Abdelouahab Doukkali est à inscrire dans ce registre. Ecrire un fragment de son autobiographie et ouvrir un lieu de mémoire : The small museum.
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Tout a commencé il y a des années, par la rencontre d’un chercheur en provenance de Boston ! Désirant écrire la bio de l’artiste, il tapa à toutes les portes, dont celle du ministère de la Culture, sans tomber sur le moindre document ! Après cette mésaventure, Abdelouahab Doukkali, épaulé par une poignée de fidèles amis, décide de prendre son fabuleux destin en mains.
Un lieu de mémoire
Situé sur les hauteurs de la tour de la Liberté, le fameux 17 étages, conçue en 1951 par l’architecte Léonard René Morandi, le petit musée de la fondation Abdelouahab Doukkali, nous donne à voir, telle une caverne d’Ali Baba, l’époustouflant parcours d’un grand artiste et au-delà, l’histoire mythique d’un lieu de mémoire.
Abdelouahab Doukkali a passé plus d’une vingtaine d’années dans les lieux avant de décider de les transformer en musée. Dans l’espace séjournèrent, avant lui, d’illustres personnages : Jacques Lemaigre Dubreuil, l’homme d’affaires dirigeant du groupe Lesieur, l’homme de presse et le militant politique défendant, avec les français libéraux, la cause marocaine. Il fut assassiné, probablement par la main rouge, au seuil de l’immeuble. Sa voiture, criblée de balles, est exposée au musée de la résistance au quartier de l’Agdal à Rabat. Denise Masson, l’Islamologue qui a traduit le Coran pour la collection la Pléiade. Après son séjour aux 17 étages, elle s’installa à Marrakech où elle finit ses jours en 1994. Son Riad abrite une fondation en son nom qui encourage les échanges entre le Maroc et la France et qui accueille écrivains et artistes en résidence. Abdelouahab Doukkali a succédé à Jean Pierre Millecam. Ecrivain et cinéphile, l’auteur de « Hector et le monstre » a consacré plusieurs de ses fictions à notre pays.
Souvenirs, souvenirs
Ouvert du mardi au dimanche de 10h à 12h30 à 17h, les visites se font sur réservation au 0522312024. (95dh). Une fois la lourde porte en bois ouverte, le seuil franchi, on plonge dans le monde de Abdelouahab Doukkali. De couloir en couloir, de chambre en chambre, on déambule appréciant les mille et un objets qui reflètent les multiples facettes de la star. Disques d’or, diplômes honorifiques, bénédictions papales, trophées, cadeaux royaux, journaux, cartes postales, prix reçus au cours de festivals nationaux et internationaux (Mohammedia, le Caire, France, Algérie, Koweït…Hommage, dont celui du festival Mawazine en compagnie de Quincy Jones… A voir les tenues de gala dont celles signées par Yves Saint-Laurent, on se remémore les concerts donnés à travers les quatre coins de la planète.
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Musicien, compositeur, interprète, luthiste virtuose… Abdelouahab Doukkali a joué de la comédie, fait du cinoche, dessine et peint. De cette dernière facette, l’ami Taïeb Seddiki note : « Je l’ai vu -ce qui s’appelle vu- je l’ai vu peindre le silence ». Ses toiles, hommages aux diverses personnalités nationales et internationales, embellissent les murs du petit musée. On admire Beethoven, Muhammad Ali, Hassan II, James Dean, Mohammed VI, Van Gogh, Gandhi, Charlie Chaplin…et Fatima Mernissi. A la lecture du manuscrit de «brin de ma vie» en 2001, la sociologue écrit : « Doukkali a réussi à faire cela dans un style d’une simplicité que seul le professionnel sait qu’elle n’est guère due au hasard. Espérant que ce livre est le début de la carrière d’écrivain de Doukkali. » Le premier tome des mémoires est sorti en arabe l’année dernière à l’occasion de la tenue du Salon du livre. Au Salon de cette année, fut présentée la traduction française. On attend avec impatience la sortie du deuxième et troisième tome. La maison d’édition Attaouhidi prévoit même une version en mandarin. Abdelouahab fera le voyage au salon de Pékin pour présentation et dédicaces…A 82 piges, l’artiste continue de nous impressionner. Longue vie !
Une fois la visite finie, on note ses impressions dans le livre d’or à côté d’André Azoulay, d’ambassadeurs et autres personnalités, et on jette un dernier regard de la terrasse avec jardin suspendu. Vue plongeante, époustouflante et sublime sur la maison blanche, la cité de Sidi Belyout.
Le petit musée de la Fondation Abdelouahab Doukkali est certes un lieu de souvenirs et de mémoire, mais c’est aussi un espace vivant. L’artiste projette d’y organiser expositions, rencontres littéraires et concerts intimes. Bon vent !