Levées de fonds tech : Le Maroc classé 5ème en Afrique, peut-il enfin entrer dans les « Big Four » historiques ?
Le Maroc a fait un grand bon en termes de levées de fonds pour startups tech dans le classement 2023 de Partech qui fait référence, réussissant à se placer dans l’antichambre des « Big Four » historiques que sont l’Afrique du Sud, le Nigeria, l’Egypte et le Kenya. Arrivé 5 ème, le Royaume peut-il briser la suprématie de ce quatuor africain de la tech ?
L’Afrique du Sud, le Nigéria, l’Égypte et le Kenya, restent encore en 2023 les principales destinations d’investissement en Afrique, captant 79 % du financement. L’Afrique du Sud a émergé en tant que leader du paysage du financement de la technologie africaine en obtenant 549 millions de dollars en equity, malgré une baisse de 34% en glissement annuel. Le Nigéria, deuxième et ayant perdu sa première place, a connu une baisse significative de 59% du total d’investissement, atteignant 469 millions de dollars en 2023, mais est resté en tête du nombre d’opérations réalisées sur ce type de financement.
L’Égypte, avec 433 millions de dollars, a subi, pour sa part, l’impact le plus important parmi les quatre premiers pays, avec une chute de 58 % du nombre d’opérations de financement en equity, comptabilisant 60 transactions sur l’année. Le Kenya, quant à lui, a capté 335 millions de dollars. « Ce quatuor caracole en tête depuis des années pour trois raisons. Concernant le Nigeria et l’Egypte, ils bénéficient de la taille de leur marché. Ils disposent en effet de marchés de plus de 100 millions d’habitants. Outre le fait de bénéficier de la taille de leur marché, ces deux pays, accusent (en comparaison avec d’autres pays) du retard dans certains secteurs, comme le taux faible taux de bancarisation, la santé ou encore l’énergie.
Ce qui ouvre des opportunités énormes pour les startups et les fonds d’investissement. Quant à l’Afrique du Sud et le Kenya, ils évoluent des marchés régionaux bien intégrés : le premier via son hinterland historique, et le second à travers le marché de l’Afrique de l’Est. La deuxième raison est que ces Big Four ont des législations et une culture anglo-saxonnes contrairement aux pays francophones où déjà les lois et circulaires mettent du temps avant de sortir. La troisième raison est que ces pays disposent aussi d’une diaspora dans les pays anglophones, notamment aux Etats-Unis et en Angleterre, qui établissent les connections entre les grands investisseurs et les startups établies dans leur pays d’origine », explique Omar El Hyani, Directeur des investissements chez MITC Capital (Maroc Numeric Fund), qui a réalisé plusieurs investissements dans des startups technologiques marocaines opérant dans les Fintech, EdTech, RegTech et l’Intelligence artificielle.
Mais en dehors du peloton de tête qui mène la danse depuis plusieurs années en termes de levées de fonds en startups technologiques, le Maroc et le Ghana sont les seuls autres pays à dépasser le seuil de 50 millions de dollars de financement en equity. Se hissant de la 15 ème à la 5 ème place au niveau africain en termes de levées de fonds pour startups tech, le Royaume, qui a capté 93 millions de dollars, n’a jamais dans l’antichambre de ces « Big Four » historiques. Pour autant, le Maroc peut-il faire partie des « Big Four » africains ? « Le Maroc a l’année dernière rattrapé beaucoup de son retard sur ces pays. Les 93 millions de dollars levés par les startups technologiques marocaines incluent certes les 62 millions de dollars levés par Cash Plus, mais même sans cette opération, le Maroc serait dans le Top 10, ce qui n’a jamais été aussi le cas. Jusque-là, le meilleur rang du Royaume est la 13 ème position dans ce classement de Partech », se réjouit Omar El Hyani.
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Mais pour le Directeur des investissements chez MITC Capital (Maroc Numeric Fund), « ça va être compliqué pour que le Maroc entre dans les Big Four historiques » africains en termes de levées de fonds tech. « Les critères d’investissement des fonds capables d’investir des centaines de millions de dollars, qui par ailleurs sont souvent des étrangers, ne sont pas en faveur de nos startups. Non seulement le marché marocain est petit mais il ne peut pas non plus s’adosser au marché de l’UMA. De plus, nous avons une économie relativement conservatrice. Les secteurs sont verrouillés. Le marché financier, par exemple, reste dominé par les banques, avec un régulateur très conservateur qui ne laisse pas de place aux nouveaux outsiders innovants. Or sur le contient, c’est la fintech qui attire le plus de fonds », argumente Omar El Hyani.
Malgré tout, beaucoup d’initiatives ayant permis à l’écosystème marocain des startups d’enregistrer des progrès ont commencé depuis 2018, selon le Directeur des investissements chez MITC Capital. « L’Etat réalise de plus en plus des initiatives pour le financement des startups innovantes. Le programme Innov Invest de TAMWILCOM est une réussite, et d’autres programmes publics comme le fonds Mohammed VI, devraient encore apporter plus de financement. Il y a de nombreux défis à relever par le Maroc avant d’entrer dans les « Big Four » historiques mais ça sera notre challenge pour les 5 prochaines années », conclut Omar El Hyani.