Coopération

Macron au Maroc : business as usual

Le président Emmanuel Macron se rendra au Maroc pour une visite officielle, marquant un nouveau chapitre dans la diplomatie entre les deux pays. Que signifie cette visite pour le monde économique ? Challenge vous propose le point de vue des entrepreneurs.

Annoncée depuis plusieurs mois, c’est finalement au Maroc, et non en Algérie, que le président Emmanuel Macron effectuera une visite officielle, prévue du 28 au 30 octobre. Cette visite, d’une grande importance sur le plan géopolitique et géoéconomique selon de nombreux experts, ouvre un nouveau chapitre dans les relations entre la France et le Maroc, après le réchauffement amorcé par des visites bilatérales de membres du gouvernement et la reconnaissance par la France de la souveraineté du Maroc. « Ma volonté est d’avancer avec le Maroc. Sa Majesté le Roi le sait, nous avons eu plusieurs discussions », déclarait le président français lors d’une conférence de presse à l’Élysée en mars 2023. Aujourd’hui, il semble que les deux États s’engagent résolument vers une coopération plus renforcée.

Sur le plan économique, Challenge s’est tourné vers les chefs d’entreprise pour analyser les enjeux de cette visite. « Nos relations économiques ont toujours été bonnes, solides et durables. Avec cette visite, elles se renforceront davantage », nous confie Loïc Jaggert, directeur général d’ENGIE Maroc. De son côté, Andrea Bises, président de l’association des FinTech et membre de la CFCIM, déclare : « Cette visite ouvre plusieurs dossiers, notamment celui de la LGV, des investissements dans les énergies renouvelables, de l’outsourcing et du secteur automobile ».

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Aujourd’hui, il semble que la France ait décidé de revoir sa diplomatie, et les récentes visites officielles en témoignent. La décision de l’Élysée d’autoriser ses institutions de développement à investir dans les Provinces du Sud traduit cette nouvelle dynamique et le retour à la normale des relations franco-marocaines. « La France est un partenaire historique, les relations sont multiples et touchent divers secteurs, notamment l’automobile, l’aéronautique, et la LGV », réaffirme l’économiste Ahmed Azirar. Il convient de rappeler que la France fait face à une concurrence accrue, notamment dans le projet d’extension de la ligne LGV Marrakech-Agadir, où l’Espagne se positionne également. Par exemple, lors du Forum économique Maroc-Espagne, un mémorandum d’entente a été signé dans le domaine des infrastructures, entre les ministères des deux pays, pour souligner leur coopération dans ce domaine stratégique.

Le retour de Paris

« Au Maroc, il y a une véritable urgence à la veille de la Coupe du monde 2030. Selon mes sources, le Maroc prévoit de lancer la première ligne LGV entre Kénitra et Marrakech en septembre 2029 », nous confie Michel Vialatte, consultant en politique publique. Il ajoute : « Ayant réalisé la première partie du projet avec le constructeur Alstom, il serait complexe, d’un point de vue technique, de changer de constructeur pour la seconde partie. Il y a donc un enjeu de continuité. » Cet avis est partagé par l’économiste Ahmed Azirar, qui précise que « la France dispose d’avantages comparatifs sur le dossier de la LGV. Il serait compliqué de changer de technologie ». Azirar ajoute que le Maroc adopte une stratégie de développement industriel et de renforcement de son secteur logistique, qui pourrait jouer un rôle clé dans le projet Afrique Atlantique. « Pour cela, il est nécessaire d’établir un cadre clair de transfert de technologie. »

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Cependant, le consultant français Michel Vialatte souligne l’importance pour la France d’adopter une approche plus consciente des dynamiques actuelles au Maroc. « Le Maroc a réussi à développer des écosystèmes industriels pour sa souveraineté économique. La France doit prendre en compte cette évolution pour établir un nouveau départ dans les relations bilatérales », affirme-t-il. Selon lui, trois impératifs doivent guider la France dans cette nouvelle relation : investir dans les Provinces du Sud pour appuyer l’initiative royale, accompagner le développement des écosystèmes industriels marocains par des transferts de technologie et la formation des salariés, et soutenir l’expansion des entreprises marocaines en Afrique subsaharienne par des partenariats stratégiques.

La diplomatie des grands contrats

Comme ses prédécesseurs, Emmanuel Macron n’ignore pas l’importance de la diplomatie des grands contrats, qui soutient une grande partie des exportations françaises. Des entreprises comme la RATP, la SNCF, Dassault Aviation, Safran, Alstom et EDF bénéficient de ces accords, qui rapportent des milliards à l’industrie française. « Vendre à l’étranger est devenu, après la Première Guerre mondiale, une nouvelle mission de la diplomatie française », explique un ouvrage intitulé Diplomatie et grands contrats : L’État et les marchés extérieurs. Ces contrats, souvent supérieurs à trois millions d’euros, représentent un enjeu financier considérable pour la France, mais aussi un moyen de mettre en avant son expertise industrielle. Ces dernières années, l’industrie française a néanmoins rencontré des turbulences, comme en témoigne le contrat des sous-marins français, d’une valeur de 34 milliards d’euros, finalement remporté par la concurrence américaine. « Au Maghreb, le Maroc et la Tunisie apparaissent parmi les partenaires les plus importants de la France », précise une lettre du Trésor.

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Le Maroc, partenaire historique de la France, continue de jouer un rôle clé dans cette dynamique économique. Pour la première partie du projet LGV sous la présidence de Nicolas Sarkozy, le groupe Alstom avait décroché un contrat de près de 400 millions d’euros pour la fourniture de quatorze rames de TGV sur l’axe Tanger-Casablanca.

 
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