énergie verte

Maintenance des centrales solaires : qui et comment ?

Ce sont des millions de dirhams qui sont mobilisés pour l’entretien des centrales solaires. Loin des regards, cette niche est un véritable business.

Il y a de cela quelques années, le paysage économique se souvient de l’opération de décrochage de l’appel d’offres de maintenance par ACWA Power de la centrale solaire Noor, développée par le géant saoudien des énergies renouvelables. Opérationnelle depuis début 2016, pour une production de 160 MW d’énergie verte, ce projet de grand acabit avoisinait un coût de maintenance de 100 MDH. L’on se rappelle également de l’appel d’offres de maintenance de la centrale solaire-gaz d’Ain Beni Mathar, remporté par l’espagnol Abengoa pour près de 63 millions d’euros. D’une superficie totale de 160 hectares, cette centrale hybride, située dans la région de l’Oriental à 90 km au sud de la ville d’Oujda, développe une puissance totale de 472 MW, dont 20 MW relevant de la technologie thermo-solaire CSP. Dans cette dynamique de transition énergétique tous azimuts, l’écosystème de la maintenance est un pan assez important et une véritable niche financière.

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Cependant, le constat, au demeurant amer, est que cette niche est dominée en grande partie par des opérateurs étrangers. En plus des centrales solaires, les parcs éoliens, générant des milliards de dirhams, sont aussi gérés par des opérateurs étrangers. À l’instar des services énergétiques, la composante de maintenance est aujourd’hui une véritable mine financière qui passe sous les radars.

« En général, dans l’estimation des coûts de ce qu’on appelle le LCOE (levelized cost of energy), on introduit les coûts de maintenance, qui sont chiffrés en un pourcentage de l’investissement. Les centrales solaires photovoltaïques, qui sont fixes en général, coûtent entre 1 % et 1,5 % de l’investissement. Dès qu’elles deviennent mobiles, cela coûte entre 2 % et 3 % de l’investissement. Quant aux centrales solaires thermodynamiques, celles qui produisent de la vapeur avant de produire de l’électricité, la maintenance représente entre 4 % et 5 %, en raison d’un entretien plus lourd », explique Amine Bennouna, expert en énergies renouvelables.

Immersion dans le monde de la maintenance solaire !

Contactée par Challenge, la filiale marocaine de l’expert français en énergie ADIWATT est très présente sur les activités de maintenance au plan local.

« Le domaine de l’énergie solaire photovoltaïque fait intervenir plusieurs types de maintenance. Nous en retenons deux probants : la maintenance préventive systématique et curative. Nous abordons d’abord la maintenance préventive systématique. L’un des composants principaux d’une centrale solaire est l’onduleur, organe clé de la transformation énergétique. Dans le cas général, un remplacement est programmé tous les dix ans, ce qui est préconisé par les constructeurs d’onduleurs. Ceci est obligatoire pour respecter la garantie, mais se justifie aussi par la haute performance des onduleurs sur la durée. De plus, nous rappelons que les modules sont retenus par des structures à vérifier et que l’énergie électrique transite par des câbles. Ces éléments sont également à contrôler lors d’une maintenance préventive afin de s’assurer de l’excellent état global de la centrale solaire », nous confie Karim Boukaa, Managing Partner Adiwatt Afrique.

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Et d’ajouter : « Par ailleurs, la maintenance préventive permet de s’assurer d’un rendement optimal de la centrale solaire. On retient notamment le nettoyage des modules solaires, qui sont responsables de la génération d’énergie et des acteurs majeurs de la transition verte. Les modules se salissent naturellement à cause des nombreuses particules transportées par l’air environnant (naturelles, comme la poussière, ou industrielles, si la centrale est située près d’une zone d’activité). Voire même par la faune locale. Il convient donc de proposer à nos clients ce type de maintenance pour prévenir un encrassement excessif qui pourrait nuire à la production d’énergie. Par exemple, nous proposons et organisons un nettoyage tous les mois. »

De son côté, l’expert en énergies renouvelables renchérit en expliquant : « Au Maroc, en termes de technologie, nous avons une centrale à tour et deux centrales à capteurs cylindro-paraboliques. Elles ont un certain nombre de points communs en matière de maintenance. Elles utilisent toutes des miroirs, donc un nettoyage régulier est nécessaire. Il y a aussi une maintenance de toute la tuyauterie, c’est-à-dire des conduites qui transportent la chaleur des points de concentration vers les lieux de production de la vapeur permettant de faire tourner les turbines. »

Et de poursuivre : « Pour ce qui est des centrales solaires photovoltaïques, l’essentiel de la maintenance consiste au nettoyage des modules, beaucoup moins fréquent que pour les centrales à miroirs. »

La maintenance, un enjeu de gouvernance

Depuis 2009, sous l’impulsion royale, le Maroc s’est résolument engagé dans une dynamique de transition écologique. Dans sa feuille de route structurant ses objectifs énergétiques, intitulée « STRATÉGIE NATIONALE DE L’EFFICACITÉ ÉNERGÉTIQUE 2030 », la question de la maintenance occupe une place importante. On peut lire que : « La maintenance des équipements permet de réduire durablement la facture énergétique (contrats de 5 à 10 ans), substantiellement (minimum 10 % d’économies) et sans investissement, tout en offrant des recommandations d’efficacité énergétique et en capitalisant sur une signature environnementale forte. »

Selon une étude de l’AMEE sur les enjeux d’une maîtrise parfaite de la maintenance, « une bonne maintenance peut réduire jusqu’à 50 % des coûts énergétiques. »

 
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