Le torchon brûle entre l’ONSSA et les vétos
Les médecins vétérinaires exerçant leur profession dans un cadre libéral et organisé dans le « Syndicat National des Vétérinaires Libéraux » (SNVL), trouvent des difficultés à faire entendre leur voix, faiblement audible par l’ONSSA, et d’attirer l’attention des pouvoirs publics sur la situation de la médecine animale au Maroc, domaine stratégique en matière de sécurité alimentaire, au sens large du terme.
Ils sont à peu près 600 vétérinaires à exercer dans un cadre libéral. La libéralisation de cette profession a été voulue et encouragée depuis au moins trois décennies. Mais la nature juridique des rapports de cette profession avec l’administration, en l’occurrence l’ONSSA, n’a pas suivi cette évolution. L’Ordre National des Vétérinaires a continué à être considéré et traité comme une simple «annexe» de l’administration publique. Cet Ordre a, par conséquent, perdu de sa crédibilité et de sa légitimité. D’où la création du SNVL en 2018, comme alternative, pour permettre à cette profession de mieux se faire entendre et se faire reconnaitre comme acteur incontournable dans la préservation de la santé animale au Maroc. Aujourd’hui, ce syndicat regroupe 369 vétérinaires exerçant dans le cadre de la profession libérale. Conscient de la situation de l’Ordre et de ses faiblesses, le SNVL a proposé à plusieurs reprises aux responsables de l’ONSSA des réunions, notamment pour examiner et mettre à jour la tarification des prestations de services des vétos et les relations qu’entretient la profession avec cet établissement public, responsable principal de la sécurité alimentaire, au sens large, et notamment la santé des cheptels, et de tous les produits alimentaires de nature végétale ou animale. Or l’ONSSA, non seulement refuse de reconnaitre ledit syndicat comme partenaire, mais persiste à maintenir des relations exclusives avec l’Ordre ou individualisées avec les médecins vétérinaires. Le modèle de «l’engagement d’exécution de toutes les campagnes de prophylaxie et d’identification programmées par l’ONSSA durant les années 2023 et 2024», conçu unilatéralement par cet établissement public, illustre bien cette logique de volonté de subordination administrative d’une profession, certes réglementée, mais exercée dans un cadre libéral.
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Ledit engagement, défini unilatéralement par l’ONSSA, est pratiquement un «contrat d’adhésion», ne laissant aucune place à l’autre partie, pour exprimer, librement et sans contrainte, son consentement. Voici quelques extraits de cet «engagement» pour illustrer : « Je soussigné, Docteur (…), m’engage personnellement à : réaliser toutes les campagnes de prophylaxie et d’identification programmées par l’ONSSA (…) ; respecter toutes les instructions dictées par l’ONSSA dans les notes de service relatives aux campagnes en question (…). En cas de force majeure, me faire remplacer par un autre VSM». Et les derniers paragraphes de cet «engagement» sonnent comme une menace: «en cas de désistement de réaliser une campagne de vaccination et/ou d’identification organisée par l’ONSSA, en 2023 ou 2024, je déclare avoir pris connaissance que je n’aurai plus droit à une zone de prophylaxie au niveau national pour les années 2024 et 2025».
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Compte tenu du faible niveau de vie de la majorité écrasante des agriculteurs dans le monde rural, le principal «gagne-pain» des vétérinaires n’est autre que les campagnes de prophylaxie rémunérées par l’Etat. Pour le SNVL, c’est pratiquement du chantage caractérisé avec une volonté unilatérale de soumettre une profession libérale dont le rôle est stratégique en matière de santé animale, et in fine, en matière de santé humaine.