Inflation

« Shrinkflation » : Pourquoi les prix ne reviennent plus à la normale ?

Au Maroc, les prix sur les étagères des supermarchés ne baissent plus. Existe-t-il réellement un hyper-profit ?

Dans son ambition de faire émerger une économie des opportunités, la candidate Kamala Harris a mis en lumière le phénomène de surcoût persistant après les vagues de conjoncture économique. En effet, dans de nombreux pays, ce phénomène s’est répandu.

En France, la baisse des prix reste un mirage. Rappelons qu’en mars dernier, les tarifs des produits alimentaires ont bondi de 1,9 % dans les rayons de la grande distribution, selon les données publiées par la société d’études Circana. Sur un an, par rapport à mars 2023, la progression de l’inflation alimentaire est estimée à un niveau rarement atteint de 16,3 %. À deux heures de la France, au Maroc, l’inflation dans les supermarchés est également une réalité. Les prix en témoignent. Pourtant, la courbe des prix semble être en stagnation. Pour comprendre cet état de fait, nous sommes allés sur le terrain pour essayer de mettre des mots sur ce contexte et percevoir la réalité des prix. Wahib Karim, un jeune étudiant à la faculté de Casablanca, nous explique qu’auparavant, avec juste 300 DH, tu pouvais te retrouver avec deux gros sacs de courses bien remplis, et qu’aujourd’hui, à peine, tu peux en remplir un sac. Nous avons constaté, lors de nos investigations, qu’un produit comme le sachet de lait Nido, qui avant coûtait environ 7 DH l’unité (avant le Covid), est passé à 10 DH, puis à 11 DH, avec un format différent (effet d’emballage). De l’autre côté, la bouteille d’eau Bahia dans certaines épiceries est passée à 12 DH, et le prix demeure inchangé malgré les efforts du gouvernement pour maîtriser la courbe inflationniste. Selon les chiffres du HCP, l’inflation ces derniers mois a enregistré une baisse de 0,2 %. On est en droit de se demander pourquoi, dans les supermarchés, les prix ne bougent pas.

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Contacté par Challenge, l’économiste Adnane Benchekroune nous explique : « Le gouvernement, pour contrer l’évolution de l’inflation, a mis en place des actions concrètes, notamment le soutien de la consommation par l’aide directe ». Par ailleurs, l’économiste a également tiré la sonnette d’alarme contre les spéculations des distributeurs : « Le gouvernement doit cependant se pencher sur la question des spéculations des distributeurs qui, pour certains, profitent de ce contexte pour pratiquer la surenchère ».

Il convient également de noter que le phénomène de la “shrinkflation” a fait son entrée au Maroc. Dans certaines surfaces, par exemple pour les jus de type Assiri, le prix est resté le même mais la quantité a diminué. Découlant du verbe anglais « to shrink » – rétrécir – cette pratique consiste, pour les fabricants de produits de grande consommation, agro-industriels ou distributeurs, à réduire les quantités des produits vendus plutôt que d’augmenter trop significativement les prix, dans un contexte où les tarifs alimentaires ont augmenté. En France, par exemple, le gouvernement s’est attaqué à ce phénomène en juillet dernier en obligeant les commerçants à afficher les modifications. « Les supermarchés devront informer leurs clients lorsque des produits en rayon ont vu leur quantité baisser sans que leur prix ne diminue », selon un arrêté publié au Journal officiel en mai 2024. Tous les supermarchés de plus de 400 m² en France devront apposer une étiquette ou une affichette « visible » et « lisible » à proximité, ou même directement sur l’emballage, de tous les produits concernés par la shrinkflation, indique l’arrêté du ministère de l’Économie.

L’omerta des distributeurs

Notons que les grandes et moyennes surfaces, supermarchés et hypermarchés, détenaient 20 % des parts de marché du secteur en 2022 contre 12 % en 2014, selon les chiffres de la Chambre française de commerce et d’industrie du Maroc. « Les différentes enseignes ont fait preuve d’une bonne gestion malgré la crise sanitaire, avec le lancement de plusieurs applications mobiles et l’arrivée de nouveaux partenariats », expliquent les auteurs de cette étude.

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Selon une note du Conseil de la concurrence, l’offre des GMS est portée par sept principales enseignes (Marjane, Acima, Aswak Assalam, Label’Vie, Métro, Carrefour et BIM) intervenant au niveau de deux principaux formats de magasins avec une centaine d’implantations. Toujours selon le CCC, le secteur des GMS au Maroc a été le théâtre de plusieurs opérations de concentration au cours des dernières années. La principale est celle de Marjane et Acima, qui appartiennent au Groupe SNI. Label’Vie a pour sa part procédé à plusieurs rachats d’entreprises de distribution, en particulier dans les villes de Rabat et Casablanca.

 
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