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Société Générale. Une affaire en or pour Moulay Hafid Elalamy !

Annoncée il y a quelques semaines, la double cession de 58% de Société Générale Maroc et 100% de La Marocaine Vie livre enfin les dessous de ce qui devrait incarner la transaction de l’année au Maroc. En raflant ces deux actifs à moins de 8 milliards de dirhams, le « loup de la finance marocaine » réalise un coup de génie à un prix des plus intéressants en payant moins que les fonds propres d’une banque solide qui dispose d’une part de marché de 8% (largement perfectible au vu de son potentiel).

Alors que les deux principaux protagonistes commencent à livrer plus d’informations sur le deal de l’année, à savoir la cession des filiales marocaines du groupe bancaire Société Générale à Saham Group, la transaction qui devra se concrétiser au cours des derniers mois de l’année en cours (après l’étape des autorisations réglementaires) prouve encore une fois, le talent de My Hafid Elalamy qui a jeté son dévolu sur des actifs à haut potentiel de croissance et ce, d’autant plus acquis à des prix des plus attractifs…..pour son groupe bien sûr.

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En effet, si le marché s’attendait à un prix dépassant la barre des 10 milliards de dirhams au vu du périmètre qui inclut tout de même le contrôle à 58% de Société Générale Maroc, une banque universelle ayant une position solide et qui revendique plus de 8% de parts de marché du crédit, la totalité du capital de La Marocaine Vie, une compagnie d’assurance aux fondamentaux des plus sains et à la capacité avérée de dégager des profits récurrents ainsi que le contrôle indirect de deux leaders du secteur para-bancaire à savoir Crédit Eqdom, numéro 2 du crédit à la consommation au Maroc avec 15% de parts de marché et ALD Automotive, le champion incontesté du marché marocain de la LLD avec un parc de plus de 10.000 véhicules; le « loup de la finance marocaine» a réussi à négocier un montant global d’«à peine» un peu moins de 8 milliards de dirhams (745 millions d’euros).

Un prix qui semble étonnement bas une fois que ses composantes décortiquées pour en déduire la part correspondant au gros morceau de la corbeille, à savoir le bloc de contrôle de Société Générale Maroc et plus particulièrement ses activités strictement bancaires (à l’exclusion de son portefeuille de participations) qui mobilisent à elles seules plus de 12 milliards de dirhams de fonds propres.

Aussi, en excluant du montant de la transaction globale la valeur potentielle de la part de 51% du capital de La Marocaine Vie acheté directement par Saham Group auprès de SOGECAP (branche d’assurance du groupe Société Générale) et estimé à près de 510 millions de dirhams (soit une valorisation globale du 4ème assureur vie au Maroc autour du milliard de dirhams au vu d’un PER (multiple du résultat net -Il intègre donc le coût du crédit et le taux d’imposition-) de 10x, niveau des plus raisonnables et en ligne avec les comparables boursiers marocains du secteur de l’assurance), le bloc de 57,67% de Société Générale Maroc, objet de la transaction, serait évalué à 7,35 milliards de dirhams. Ce qui induit une valorisation implicite de 100% du capital de la banque en vente dont la création remonte à il y a plus d’un siècle, à un peu moins de 13 milliards de dirhams, soit bien moins que les 14,5 milliards de dirhams de ses fonds propres consolidés Part du Groupe à fin 2023.

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En définitive, Saham Holding qui avait empoché en 2018 plus d’un milliard de dollars (plus de 10 milliards de dirhams) auprès du sud-africain Sanlam pour la cession de Saham Finances, la structure de tête de son pôle d’assurance et d’assistance dont faisait partie Saham Assurances (devenu entre-temps Sanlam Maroc), mettrait la main sur Société Générale Maroc pour un P/B (multiple de fonds propres-coefficient qui mesure le rapport entre la valeur de marché et le montant comptable des capitaux propres-) de seulement 0,87x alors que presque toutes les banques marocaines actuellement cotées en bourse traitent largement au-dessus de ce multiple.

Et même en affinant l’analyse de la transaction en cours par cantonnement des valorisations des principales participations de Société Générale Maroc, l’acquéreur paierait l’activité bancaire proprement dite de celle-ci à un P/B et un PER respectivement d’à peine 0,8x et 11,3x (Voir tableau ci-après). A titre de comparaison, le petit poucet du secteur bancaire marocain (cinq fois plus petit que SG Maroc en total bilan), en l’occurrence CFG Bank, avait été introduit à la bourse de Casablanca en décembre 2023 à un P/B de 2x ses fonds propres et un PER de 15x ses bénéfices en tenant compte des agrégats prévisionnels de l’année suivante !

Sans doute que des investissements complémentaires devant être consentis par l’acheteur, notamment pour édifier un système d’information et une organisation indépendante de l’ex-maison mère, ont été pris en compte dans le prix de la transaction mais la rupture du cordon ombilical avec celle-ci engendrerait également, au passage, des économies chez Société Générale Maroc de près de 100 millions de dirhams relatives aux montants qu’elle reverse annuellement à Société Générale France au titre de différentes prestations techniques. Aussi, il n’en demeure pas moins que le prix de la transaction demeure une réelle opportunité pour l’acheteur au regard des comparables boursiers, voire de toutes les transactions comparables advenues sur le marché bancaire marocain depuis une vingtaine d’années y compris des prises de participation minoritaires de groupes étrangers dans le capital d’acteurs locaux.

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Il faut dire qu’outre les qualités indéniables de redoutable négociateur dont jouit Moulay Hafid Elalamy, l’empressement du Groupe Société Générale à se départir de ses activités marocaines dans le cadre d’une stratégie globale de désengagement de l’Afrique a également fait les affaires de l’acheteur. C’est ainsi que la vente de SG Maroc et La Marocaine Vie vient ponctuer une série de cessions d’actifs opérée par la banque de la Défense au cours des dix derniers mois à travers la vente de ses filiales au Burkina Faso, au Mozambique, au Congo, en Guinée Equatoriale, au Tchad et en Mauritanie. D’ailleurs, la transaction avec le Groupe Saham devrait même occasionner, chez Groupe Société Générale, un impact comptable négatif d’environ 75 millions d’euros (plus de 800 millions de dirhams) sur ses résultats attendus du premier trimestre 2024, ce qui veut dire que l’heureux acheteur décaisserait un montant inférieur à la valeur des actifs concernés tels que comptabilisés à l’actif du vendeur !  

 
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